Les prix à la consommation des carburants en Corse sont en effet en général plus élevés que ceux constatés en France continentale et ce, malgré une fiscalité allégée sur les produits énergétiques applicable dans les deux départements de l'île. De nombreuses études ont été menées récemment. Citons la mission de l'inspection générale des finances (IGF) relative à l'économie corse, l'avis de l'Autorité de la concurrence relatif au niveau de concentration des marchés en Corse, publié en 2020, ou encore le rapport sur la sécurisation de l'approvisionnement en carburants en Corse, publié lui aussi en 2020.
Les éléments d'explication suivants ont été avancés : chaîne de logistique devant passer par le transport par bateau, du fait de l'insularité ; contraintes sur les produits engendrées par le transport maritime ; surcoûts logistiques entraînés par le faible nombre de dépôts de stockage sur l'île ; maillage territorial très dense des stations-services lié à la configuration montagneuse qui renchérit les coûts de la distribution ; faible intensité concurrentielle due notamment au fait que la grande distribution n'a pas de points de vente de carburants sur l'île.
L'Autorité de la concurrence s'est saisie d'office, le 15 décembre 2021, du sujet de l'approvisionnement, du stockage et de la distribution des carburants en Corse. La complexité des sujets et les contraintes de la procédure contentieuse expliquent les délais d'instruction, mais la décision est attendue pour cette année.
L'une des propositions formulées par l'Autorité dans son avis de 2020 consiste en un recours à la réglementation des prix prévue par l'article L. 410-2 du code de commerce aux termes duquel « dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d'approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d'État peut réglementer les prix après consultation de l'Autorité de la concurrence. » Il est important néanmoins de rappeler que le recours à une réglementation tarifaire est susceptible de générer des effets pervers. Il pourrait notamment conduire à plafonner la marge commerciale des opérateurs, avec un effet quasi certain d'alignement des prix à la pompe sur le maximum autorisé.
En outre, dans la mesure où le différentiel de prix est essentiellement lié au coût plus élevé des produits, du transport et du réseau de distribution, le prix réglementé devrait être fixé à un prix peu éloigné du prix actuel, à moins de remettre en cause la densité du maillage territorial en stations-services. Un dispositif de prix réglementés pourrait donc conduire à figer les surcoûts au lieu de les réduire comme vous le souhaitez, si nous ne nous attaquons pas aux raisons structurelles de ces surcoûts. Or, comme l'a indiqué Bruno Le Maire l'été dernier, notre objectif est bien de travailler à la réduction des causes structurelles des surcoûts constatés en Corse.