Nous avons le plaisir de recevoir M. Buon Tan, ancien député et ancien conseiller de Paris, chef d'entreprise.
Je vous remercie, cher collègue, d'avoir accepté de répondre à nos questions.
Notre commission d'enquête travaille depuis plusieurs semaines sur les possibles ingérences étrangères dans la vie politique, économique et médiatique du pays à travers les dirigeants politiques, les relais d'opinion ou les agents publics. Les auditions que nous avons menées ont confirmé l'importance d'une « zone grise », située entre ingérence et influence, constituant un terrain d'action de plus en plus prisé par certaines grandes puissances. La question est de savoir si ces tentatives respectent le cadre légal et les intérêts de notre pays ainsi que l'intégrité des membres de nos institutions.
Nous avons souhaité vous entendre car plusieurs articles de presse ainsi qu'un rapport – émanant lui-même de l'étranger – vous accusent d'avoir subi l'influence ou des tentatives d'ingérence de la part du régime chinois ou de défenseurs des intérêts de ce régime. De fait, la Chine a été désignée par les experts que nous avons auditionnés et par les services de renseignement comme une puissance particulièrement active et hostile à certains intérêts français ainsi qu'aux valeurs que nous défendons collectivement. L'action de ce pays se déploie dans tous les secteurs qui l'intéressent : les milieux économiques, politiques, diplomatiques et académiques.
Une commission d'enquête parlementaire ne se substitue pas à la justice. Il ne nous appartient pas de nous prononcer sur telle ou telle accusation dont vous êtes l'objet. Il s'agit de comprendre une situation et d'entendre votre point de vue.
De quels systèmes d'influence et d'ingérence avez-vous eu à connaître durant votre carrière – de la part de la Chine ou d'autres puissances, car vous n'êtes pas affilié d'autorité à la puissance chinoise –, y compris en tant qu'entrepreneur ? En effet, vous êtes un enfant d'entrepreneur à succès et entrepreneur à succès vous-même.
Au-delà de l'ingérence, quelles relations la Chine construit-elle en France ?
Percevez-vous une différence entre l'ingérence et l'influence ?
Je tiens à préciser, à l'intention de ceux qui nous écoutent, que vous êtes arrivé en France en tant que réfugié, puis avez été naturalisé. Vous avez fui le Cambodge avec votre famille à l'époque des Khmers rouges. Vous avez témoigné dans la presse du fait que vous aviez été vous-même victime de persécutions durant votre enfance. Vous avez brillamment réussi vos études en France et vous vous êtes engagé dans une carrière qui vous a conduit jusqu'au Parlement. Si je rappelle tout cela, c'est parce que, parmi les éléments alimentant les soupçons d'influence, il y a le fait que vous ayez été le seul parlementaire à ne pas voter en faveur de la proposition de résolution tendant à la reconnaissance du génocide des Ouïghours. À l'époque, vous aviez répondu en rappelant ces épisodes de votre existence.
En tant que député, vous avez présidé le groupe d'amitié France-Chine. Nous souhaitons recueillir également votre témoignage concernant les actions menées en cette qualité, ainsi que votre analyse du fonctionnement de ces groupes, en particulier lorsqu'il s'agit de régimes autoritaires, de dictatures ou d'États n'ayant pas les mêmes intérêts que les nôtres ou ceux de nos partenaires européens.
Je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure. »