Les menottes ne sont pas toujours enlevées, même si nous en faisons la demande. La personne peut être menottée devant ou derrière. J'ai le choix : je peux dire que je souhaite que la personne soit démenottée et, si on me répond que ce n'est pas possible, je peux dire que je ne la reçois pas. Mais c'est la personne concernée que je pénalise alors.
Par ailleurs, je ne reçois pas nécessairement dans mon bureau, qui est très petit. Je vois souvent les patients dans le quartier d'isolement disciplinaire où nous utilisons une salle, qui est celle des avocats. Nous y recevons le patient, qui peut être menotté. En revanche, je refuse toujours la présence du personnel pénitentiaire. Il m'arrive de faire des évaluations très rapides au quartier disciplinaire et qu'on ne veuille pas nous ouvrir la grille, toujours pour de bonnes raisons. Il faut peser. Nous sommes obligés d'accepter certaines choses qui sont contraires aux pratiques habituelles pour que les personnes puissent accéder à des soins. Certes, il s'agit aussi d'un cercle vicieux puisqu'à partir du moment où nous acceptons certaines choses, on risque de nous en demander encore plus. Mais ce qui prime, c'est la clinique, le fait de pouvoir évaluer les personnes et de leur proposer des soins.