L'avenir appartient à ceux qui apporteront des réponses, par le biais scientifique, aux défis que l'avenir nous réserve. Que l'on parle de sciences techniques ou de sciences humaines, c'est systématiquement à l'aune de ces dernières que les plus grands progrès de l'humanité ont été réalisés.
Cependant, un mal grandissant couve, et nous devons impérativement nous en prémunir, avant qu'il ne soit trop tard. Dans un contexte de révolution des pratiques informatives, notre jeunesse commence à douter. En 2022, 33 % des jeunes estimaient que la science apportait plus de bien que de mal, contre 55 % en 1972 ; ce recul est à tout le moins regrettable. Contrairement à leurs aînés, les jeunes d'aujourd'hui refusent de croire aux vérités qu'on leur assène et se réfugient volontiers dans des théories alternatives : pour un jeune sur cinq, les Américains ne sont pas allés sur la Lune ; pour un jeune sur trois, les êtres humains ne sont pas issus d'une longue évolution des espèces.
La culture scientifique est en baisse, et je crains que nos actions n'aillent pas dans le sens d'un rétablissement de la situation. Je regrette, à titre personnel, la suppression des filières lors de la dernière réforme du baccalauréat. Certes, la filière scientifique avait une image prestigieuse, voire élitiste, mais elle avait le mérite d'attirer des élèves motivés vers un cursus résolument tourné vers les sciences. Les chiffres nous indiquent désormais que, même si elles restent prisées, les matières scientifiques attirent de moins en moins de lycéens. Pour preuve, les mathématiques n'étaient plébiscitées que par 37 % des élèves de terminale en 2022, contre 41 % l'année précédente. Au-delà, nous constatons que le nombre global d'heures d'enseignement de la matière a chuté de 18 % entre 2018 et 2020.
Selon moi, pour redonner une certaine appétence à nos élèves, il faudrait non seulement travailler sur les matières dites classiques, mais également ouvrir nos cursus à des domaines plus modernes tels que les champs d'études liés au numérique, à la robotique ou à l'environnement. D'autre part, nous constatons que, là où il existe des partenariats entre établissements scolaires et associations à visée scientifique, nos jeunes s'épanouissent. Je ne peux qu'appeler de mes vœux des procédures simplifiées pour l'établissement de tels partenariats.
Parler de sciences, c'est également parler de sciences humaines. Là encore, je regrette que ces dernières soient largement reléguées au second plan dans le schéma d'étude proposé au lycée. Plus globalement, que l'on parle des sciences techniques ou sociales, les constats que j'évoque doivent nous amener à nous poser une question simple, mais essentielle : la formation proposée est-elle adaptée à une bonne insertion universitaire et répond-elle aux besoins actuels et futurs du pays ? Malheureusement, les craintes sont de plus en plus grandes à ce sujet, car les orientations que nous prenons ne semblent pas aller dans le bon sens.
Au-delà de l'école, le débat que nous avons ce soir concerne l'État et nos politiques publiques. En effet, une révolution est également à mener au sein de notre appareil d'État. Nous évoluons dans un monde incertain, où les crises se multiplient et sont particulièrement aléatoires.
Face à ce constat, la préparation est indispensable. À cet effet, il semble nécessaire de consolider nos capacités de prospective, de programmation et de planification. Je crois fermement que cette volonté doit se traduire par un renforcement des moyens humains et matériels de nos établissements publics spécialisés. Nos budgets doivent être adaptés en conséquence. Or ce n'est pas ce que nous avons vu dans cette assemblée lors des derniers débats budgétaires. Les investissements que l'on consentira en la matière sont autant d'argent que l'on ne versera pas à des cabinets de conseil extérieurs, qui, à long terme, coûtent bien plus cher à nos finances publiques.
Quant à l'application des sciences sociales dans la conduite de nos politiques publiques, elle devrait se traduire en premier lieu – je le dis au risque d'être polémique – par une révolution copernicienne de nos modes de décision. Je crois qu'une meilleure prise en considération des corps représentatifs est indispensable ; l'actualité nous le rappelle. Les collectivités territoriales, les parlementaires, les forces syndicales et autres organismes de représentation, les conventions citoyennes sont là non pas pour ralentir le pays, mais bien pour l'aider à aller plus loin. Seul, on va certainement plus vite, mais ensemble, on va bien plus loin.