Les enfants exposés à des dysfonctionnements familiaux ou à la précarité présentent un risque bien plus important de développer des troubles psychiques. Selon le rapport, 55 % des adolescents hospitalisés dans les services de psychiatrie pour adultes sont pris en charge par l'aide sociale à l'enfance. Que pensez-vous de ce constat alarmant, alors que les inégalités explosent ?
La pédopsychiatrie est confrontée aux mêmes difficultés que l'ensemble du système de soins et d'accompagnement : absence, jusqu'en 2018, d'une programmation pluriannuelle et d'une vision coordonnée sur le long terme des services ; déficit d'attractivité des métiers – le nombre de pédopsychiatres a diminué de 34 % depuis 2010 ; difficile coordination entre la ville et les établissements, renforcée par l'effondrement de la démographie médicale – plus d'une dizaine de départements ne disposent d'aucun pédopsychiatre libéral ; inadéquation entre les moyens et les missions – l'exemple des centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP) est flagrant ; politique de prévention encore timide.
Du fait de ces lacunes, la prise en charge de certains adolescents pour des soins urgents est assurée dans des services pour adultes, ce qui revient à les exposer à un risque traumatogène majeur. Par manque de lits, l'État contribue à mettre en danger des enfants déjà particulièrement vulnérables.
Vos recommandations sont multiples : formation des professionnels de premier recours, développement des équipes mobiles, ou encore généralisation des maisons des enfants et des adolescents. « En l'absence de possibilité de dépassement de l'enveloppe nationale de financement de la psychiatrie, toute nouvelle création s'effectuera en ponctionnant les établissements existants », écrivez-vous toutefois. Tant que les moyens seront déployés à budget constant, nous ne sortirons pas de l'impasse et du rafistolage permanent.
Au cours des vingt dernières années, le nombre d'enfants suivis chaque année en pédopsychiatrie a augmenté de plus de 60 %. Pourtant, nous ne nous sommes toujours pas dotés des indicateurs nécessaires pour développer une offre adéquate, dans une logique populationnelle. Dès lors, comment faire en sorte que les recommandations pertinentes de ce rapport se traduisent en actes ?