En juillet 2022, j'ai réservé l'un de mes premiers déplacements en tant que députée à l'établissement public de santé mentale de la Sarthe, à Allonnes. Une phrase est ressortie de mes échanges avec le personnel soignant : « On n'est plus au pied du mur, il est déjà tombé. »
Si la psychiatrie est le parent pauvre de la médecine, la pédopsychiatrie est son enfant pauvre. Ce n'est pas une découverte pour moi : cette réalité a été mon quotidien d'éducatrice spécialisée en pédopsychiatrie pendant de nombreuses années, jusqu'à mon élection. Depuis des années, les professionnels, les parents, les patients et les élus tirent la sonnette d'alarme. Selon le rapport, environ 1,6 million d'enfants et d'adolescents français souffrent d'un trouble psychique, mais à peine la moitié bénéficie de soins pédopsychiatriques. Les besoins sont en constante augmentation, et la crise du covid a agi comme un amplificateur. Pourtant, les moyens ne suivent pas.
Le nombre de pédopsychiatres a diminué de 34 % entre 2010 et 2022. Du fait de la suppression de lits, de nombreux enfants souffrant de troubles moyens à sévères se retrouvent dépourvus de la possibilité d'un suivi de long terme. Les CMP-IJ, devenus le principal lieu de prise en charge en ambulatoire, arrivent à saturation. Dans certains territoires, les patients et leur famille attendent une prise en charge pendant deux ans. Et je ne parle pas des ruptures dans les parcours de soins.
Lors des assises de la santé mentale et de la psychiatrie, le Gouvernement a annoncé la création de 400 postes dans les CMP-IJ, soit quatre par département, ce qui est largement insuffisant. Votre rapport recommande lui aussi de renforcer les moyens alloués aux CMP-IJ dans les territoires sous-dotés. La Cour a-t-elle évalué le nombre de postes supplémentaires qu'il faudrait créer, et l'investissement que cela induirait, afin de réduire les délais d'attente pour une prise en charge ? La feuille de route de la santé mentale et de la psychiatrie ne fixe ni objectifs clairs ni calendrier.
Il faut impérativement prendre en compte les conclusions de ce rapport, changer de cap et gouverner en partant des besoins, comme l'avait déjà demandé ma collègue Caroline Fiat dans un rapport d'information publié en 2019.
Comment peut-on réellement prendre soin de la santé mentale de nos enfants alors qu'aucun plan sérieux ni aucune gouvernance opérationnelle et transversale n'existent ? Combien de rapports faudra-t-il écrire ? Combien de fois devrons-nous tirer la sonnette d'alarme avant que l'on agisse ?