Intervention de Clément Beaune

Réunion du mercredi 22 mars 2023 à 17h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Clément Beaune, ministre délégué :

Monsieur Giraud, le système d'adossement prévu par la LOM est encadré par la loi et le droit communautaire, et fait l'objet d'un contrôle de l'ART. On vient souvent me voir pour me demander de financer un contournement par une concession. Le contournement ouest de Montpellier, que nous sommes en train de réaliser, est pour l'instant le seul exemple d'application du mécanisme prévu à l'article 161 de la LOM. Celui-ci exclut des adossements significatifs et ne peut donc pas être utilisé de manière systématique pour financer des infrastructures.

Monsieur Mournet, nous avons transposé, le 10 de ce mois, la nouvelle directive « Eurovignette ». Les redevances ne seront pas intégrées à la tarification des contrats existants mais uniquement à celle des contrats à venir.

Monsieur Tanguy, l'État de droit a pour fonction de protéger. Certes, les contrats ont été mal négociés sur certains points – l'évolution des tarifs, en particulier, doit être revue – mais ne faites pas croire que l'État a encaissé un argent qui serait « planqué » à Bercy ou au ministère des transports ou que les sociétés concessionnaires d'autoroutes ne paient pas d'impôts. Nous avons la volonté de faire évoluer l'équilibre économique de ce modèle, mais n'employons pas des mots comme « abusif » ou « spoliation », qui justifieraient des sanctions. Nous avons défendu l'intérêt des contribuables en justice, il y a quelques mois, dans le cadre du contentieux sur la contribution volontaire exceptionnelle.

Monsieur Brun, je vais être très transparent – je peux d'ailleurs vous communiquer mes agendas, qui sont publics. Si ma mémoire est bonne, j'ai rencontré les sociétés concessionnaires à trois reprises, ce qui me semble légitime en ma qualité de ministre chargé des transports. Lors de notre première entrevue, en juillet 2022, de premières mesures de réduction tarifaire ont été décidées. Lors de notre deuxième rendez-vous, en octobre, j'ai lancé la discussion sur les mesures tarifaires et en particulier le coût des abonnements. Je les ai vues pour la dernière fois en décembre, si je ne me trompe, mais je vérifierai mon agenda et je vous apporterai les précisions nécessaires. Je les rencontrerai à nouveau, naturellement.

En juillet, nous avons parlé de l'augmentation des tarifs des péages, dans un contexte d'inflation élevée. Nous avons mis toutes les options sur la table, y compris l'extension des concessions en contrepartie de la modération tarifaire, mais je n'ai pas souhaité faire cela. Dans les derniers avenants, nous n'avons pas étendu les concessions. Aucune extension n'a eu lieu depuis 2017. Cela ne me paraît pas être la bonne méthode.

Il faut en effet renforcer les moyens de l'ART et nommer un président à sa tête.

Les ministères de l'économie et des transports ont rédigé la saisine du Conseil d'État, qui a été transmise à Mme la Première ministre. Je crois qu'elle a été signée ; si ce n'est pas le cas, elle devrait l'être dans les heures qui viennent. Lors de la présentation des orientations du plan d'avenir pour les transports, Mme la Première ministre a exprimé le souhait que les sociétés concessionnaires d'autoroutes contribuent à l'effort d'investissement exigé par la transition écologique. Nous demandons au Conseil d'État d'examiner toutes les options fiscales à notre disposition.

Madame Sas, vous avez raison, concession ne signifie pas nécessairement recours au privé. Nous avons connu un modèle concessif public, qui est devenu en partie ou en totalité privé, selon les sociétés, entre 2001 et 2005. Pour l'avenir, on doit se poser un certain nombre de questions. Les sociétés concessionnaires d'autoroutes devront-elles être partiellement ou totalement privées ? Le système public permet-il une meilleure gestion ? À mon sens, il évite les inconvénients de la surprofitabilité : lorsqu'une société publique connaît une très bonne année, l'État perçoit directement les dividendes. Vaut-il mieux recourir à des sociétés privées, mais dans un cadre contractuel plus exigeant, en particulier sur le plan fiscal ? Faut-il remettre en cause le modèle de la concession, qui peut être public ou privé ? Parmi ses nombreux avantages, le système concessif permet de se projeter sur le long terme, alors que les gestionnaires publics peinent parfois à avoir une vision pluriannuelle. Les lois de programmation ne sont qu'indicatives, et l'investissement public est soumis à des effets de yo-yo.

Les assises que je souhaite ouvrir avec le ministre de l'économie seront l'occasion de débattre de l'avenir des concessions. Dans le passé, on a agi de la pire manière qui soit, au débotté, dans le cadre d'une vision de court terme, ce qui a suscité des polémiques et alimenté des accusations de complot. Je m'engage à ce que vous soyez associés aux travaux à venir, qui nous permettront d'explorer toutes les pistes.

Les nouveaux contrats prévoient toujours une fiscalité spécifique aux sociétés concessionnaires d'autoroutes, mais cet engagement de stabilité ne concerne pas la fiscalité générale : c'est l'objet du contentieux relatif à la TAT. Nous souhaitons que la fiscalité puisse évoluer en fonction des choix du législateur, sans que l'État ait à apporter de compensation. Nous avons gagné en première instance. Le jugement définitif devrait être rendu dans les mois qui viennent.

Tous les nouveaux contrats prévoient une adaptation des tarifs au taux de rentabilité : cela fait partie des points que nous avons améliorés. En outre, nous avons inséré, dans les contrats historiques, des clauses de modération tarifaire. Si la hausse du chiffre d'affaires excède de plus de 5 % l'évolution prévue, le tarif est modulé en conséquence. L'ART a jugé ces évolutions pertinentes.

Monsieur Laqhila, l'État et les collectivités locales peuvent se révéler de bons gestionnaires, mais le privé a également son utilité. Tout dépend des contrats, des incitations, de la fiscalité. Il faudra mener cette réflexion lors des assises.

Madame Panonacle, on peut moduler la tarification des péages à condition que ce soit financièrement neutre. Ce qu'un usager paie en moins, un autre usager doit le payer en plus, à moins de réduire les investissements dans le réseau autoroutier. J'ai chargé les préfets de région d'explorer toutes les possibilités de modulation dans le cadre d'un travail associant les élus concernés.

La mise à deux fois trois voies de l'A63 fait l'objet, actuellement, d'une concertation préalable organisée par la Commission nationale du débat public (CNDP) jusqu'au 30 avril. Je devrai ensuite décider des suites à donner. Nous savons qu'un élargissement sur une section très longue – en l'occurrence, 35 kilomètres – est difficile à faire entrer dans l'économie d'une concession existante, mais nous serons attentifs aux résultats de la concertation. Nous en reparlerons au cours des semaines à venir.

Monsieur le président Coquerel, je crois avoir répondu à vos interrogations.

Monsieur le président Zulesi, nous aurons l'occasion d'examiner un certain nombre de vos questions en préparant, avec vous, l'ouverture des assises.

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