Il s'agit en effet d'une série d'amendements visant à préciser le champ d'application de la loi. À mon avis, cette recherche de précision à outrance risque de rendre le texte inapplicable. Ainsi, l'amendement n° 36 de Madame Rouaux intègre dans le dispositif transmanche l'Espagne et le Portugal, mais pourquoi pas l'Italie ou le Maghreb ? On ne le sait pas et c'est un problème, car il n'y a aucun critère permettant au juge d'apprécier la proportionnalité de l'application du dispositif à ces destinations. En outre, les listes de destinations brouillent le signal que la proposition de loi envoie aux armateurs en leur laissant alors la possibilité par défaut de pratiquer le dumping social sur d'autres liaisons qui ne seraient pas protégées par la loi, ce qui serait pour le moins curieux.
Les amendements n° 65 et 84 proposent d'inscrire le terme « transmanche » dans la loi comme en déterminant le champ d'application, mais sans définir ce terme juridiquement. Enfin, l'amendement n° 66 est celui qui va le plus loin dans l'excès de précision : il définit chaque ligne soumise à la future loi en désignant le port de départ et le port d'arrivée. Mais que se passerait-il si un armateur décidait, par exemple, de faire partir son Dieppe-Newhaven du Havre ou d'ailleurs ? Il lui suffirait de changer son port de départ ou d'arrivée pour contourner cette loi et nous serions obligés de légiférer à chaque changement dans l'offre commerciale des compagnies de ferries.