Le dumping social dans les liaisons maritimes transmanche, sur l'un des détroits les plus fréquentés au monde, est un fléau contre lequel il faut lutter en mettant fin aux pratiques déloyales de certaines compagnies. C'est une impérieuse nécessité pour préserver les compagnies sous pavillon français, ainsi que les 38 000 emplois des marins français travaillant dans différents types de navigation.
Il y a un an, le licenciement de 800 marins britanniques par P&O Ferries – filiale britannique de Dubai Ports World – pour les remplacer par des marins extra-européens fut un électrochoc : cinq mois plus tard, cette compagnie annonçait des bénéfices records de 721 millions de dollars. C'est l'illustration des dérives d'une mondialisation sauvage où les voyous – pour reprendre le mot de notre collègue François Ruffin en commission – sont sans foi ni loi. Ce dumping social se caractérise par l'embauche de marins dont les salaires sont inférieurs à ceux des marins européens – 300 dollars par mois selon l'Organisation maritime internationale (OMI) –, dont la couverture sociale est quasi absente et dont les conditions de travail, moins-disantes, font peser des risques sur leur santé et sur la sécurité de la navigation en mer. Ces conditions de travail, inacceptables, s'apparentent à de l'esclavage moderne.
Face à cette situation intolérable, les acteurs français de la liaison transmanche ont lancé un appel le 5 novembre dernier à Saint-Malo, pour nous demander collectivement d'agir contre le dumping social. À l'écoute de la filière, j'ai pris l'initiative en décembre dernier de vous envoyer, monsieur le secrétaire d'État, un courrier transpartisan, cosigné par vingt-huit parlementaires bretons, afin de vous alerter. La présente proposition de loi, dite de police, est pertinente dans sa philosophie, d'autant que les parlementaires britanniques ont adopté en première lecture une législation au contenu similaire, afin de réguler ce secteur d'activité. L'adoption de ce texte amorcerait ainsi une convergence de droits.
Toutefois, cette proposition de loi est perfectible et mériterait de manifester davantage d'ambition, afin d'harmoniser les conditions de travail et la représentativité des marins, qui sont aussi des facteurs de dumping social. C'est le sens des amendements des députés socialistes, qui visent à rectifier ces faiblesses grâce aux propositions suivantes : réécrire l'article unique sur la base de la proposition de loi de notre collègue Sébastien Jumel, dont je tiens à saluer la qualité et l'ambition ;