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Intervention de Danielle Simonnet

Réunion du mercredi 22 mars 2023 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Simonnet :

Dans le contexte actuel, faire passer une telle proposition de loi est ce que vous pouvez faire de pire. Les loyers ne cessent d'augmenter, les charges locatives explosent et la hausse du coût de la vie prend à la gorge la quasi-totalité de la population. Avez-vous seulement conscience de l'urgence de la situation ? Dans ma circonscription, des locataires manifestent car leurs charges, à la suite de votre refus de bloquer les prix de l'énergie, vont augmenter de jusqu'à 200 euros par mois, en plus de la hausse des loyers, que vous avez encouragée. Des témoignages et des mobilisations similaires se multiplient dans tout le pays. Quelle est la réponse de la Macronie ? Laisser TotalEnergies et les autres fournisseurs se gaver sur le dos des gens et, en plus, faciliter l'expulsion des locataires lorsqu'ils se retrouveront, comme beaucoup le craignent, avec des impayés de loyer. À quelques jours de la fin de la trêve hivernale, et alors que nombre d'associations anticipent une explosion des impayés et des expulsions, cette proposition de loi est une provocation et une honte absolue.

Par ailleurs, le texte sera inefficace si on se place du point de vue des intérêts des petits propriétaires. En effet, il augmentera le nombre d'expulsions, et donc le nombre de personnes qui seront contraintes de se réfugier, pour survivre, dans des squats. Par ailleurs, il aggravera l'engorgement des tribunaux et allongera ainsi les délais dans lesquels la justice est rendue. La prévention est pourtant bien plus efficace que la répression, y compris pour la défense des intérêts des petits propriétaires, puisqu'un locataire qui arrive à rembourser ses échéances pendant quelques mois devient éligible au FSL, le Fonds de solidarité pour le logement, ce qui permet de solder le reste de sa dette à l'égard du propriétaire. Votre proposition est donc injuste et inefficace.

Les alertes sont nombreuses, et elles viennent de toutes parts. La Défenseure des droits en a lancé une, et le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme a écrit aux parlementaires pour les alerter du danger de ces dispositions, auxquelles s'opposent par ailleurs le Collectif des associations unies, la Fondation Abbé Pierre, le Secours catholique, ATD Quart Monde et le DAL – l'association Droit au logement. Tous les experts du droit au logement considèrent que cette proposition de loi, si elle devait être adoptée, serait un désastre, en ce qu'elle criminaliserait les locataires ayant des impayés de loyer et faciliterait les expulsions. Le Gouvernement lui-même n'est pas à l'aise. Lors de l'examen en première lecture, le ministre chargé du logement n'est même pas venu défendre ce texte, à l'égard duquel il a émis des critiques dans la presse.

Je vous propose une petite devinette. Qui disait ceci, il y a quelques années : « il faut changer d'urgence la loi qui profite aux squatteurs et spolie de braves gens de leur propriété » ? La citation pourrait être de vous, Monsieur Kasbarian, mais elle est en réalité de Marine Le Pen. Cette proposition de loi, soutenue par l'aile la plus brutale de la Macronie, accompagnée du groupe LR, emboîte allègrement le pas au Rassemblement national, qui vient de saluer ce texte reprenant ses propositions contre les locataires. Sous prétexte de quelques faits divers, que l'ancienne ministre Emmanuelle Wargon avait elle-même décrits comme anecdotiques, vous allez condamner à la rue et à la prison des milliers de locataires ayant des impayés de loyers. Vous violez au passage nombre de droits fondamentaux, comme l'a écrit le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme : la liberté d'association, la liberté d'expression, la liberté de la presse et même le droit de grève, puisque la proposition de loi permettra de pénaliser des piquets de grève. Que toutes celles et tous ceux qui nous regardent participent à la manifestation organisée contre ce texte inique le 1er avril, à l'occasion de la fin de la trêve hivernale.

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