Madame la directrice générale, au mois de juillet 2019, vous avez été auditionnée par la commission des affaires sociales. Nous ne sommes plus aujourd'hui dans la même situation : l'Afpa était alors dans une grande tourmente et avait besoin d'un nouvel élan. Cette tourmente était liée aux réformes aboutissant à la marchandisation croissante de la formation professionnelle. Il s'agissait d'une part, de celle portant décentralisation des compétences emploi et formation auprès des régions, et d'autre part, de celle ouvrant le secteur de la formation professionnelle à la concurrence.
La situation financière était très inquiétante, malgré la qualité du travail de l'entreprise. Il s'agissait là d'un sujet de vives préoccupations, compte tenu du rôle fondamental de l'Afpa pour le développement d'une formation professionnelle de qualité ; la consolidation des métiers et des qualifications et l'élévation du niveau des qualifications afin de faire face aux besoins et défis de notre temps.
La formation professionnelle constitue un enjeu essentiel pour la santé et l'épanouissement au travail. Devenue un Epic, l'Afpa s'est vu confier quatre missions de service public : l'ingénierie de certification des titres professionnels délivrés par le ministère du travail ; l'accompagnement de l'émergence et de la structuration des métiers et des compétences de demain ; l'anticipation de l'évolution des métiers, des compétences et des filières sur le territoire ; l'appui à des opérateurs du conseil en évolution professionnelle, en proposant notamment une offre de découverte des métiers et de maturation des projets professionnels sur les plateaux techniques.
Pour mener à bien ses missions de service public, l'Afpa reçoit une dotation annuelle de 110 millions d'euros, qui n'évolue pas depuis 2018. Certes, il existe une subvention exceptionnelle versée chaque année, mais elle devrait être pérennisée et mise à niveau pour vous donner de la stabilité et de la visibilité. Il demeure également une question sur la gestion de votre patrimoine, notamment l'hébergement qui doit être un atout ; mais également sur la dette domaniale. Nous avons besoin en effet de desserrer les contraintes financières qui pèsent sur votre développement.
En effet, à ces sujets s'ajoute une nouvelle baisse au budget 2023 du plafond d'équivalents temps plein, comme si l'État voulait continuer de marquer une volonté d'austérité à l'égard d'un établissement qui a déjà été très affecté et dont la situation financière a connu une amélioration. L'Afpa mériterait une augmentation du plafond calibré sur un chiffre d'affaires qui était environ de 550 000 euros annuels. Cette situation est paradoxale, alors même que le nombre d'emplois réels qui concourent à son fonctionnement va bien au-delà, avec aujourd'hui 1 800 personnes en CDD, ce qui pèse sur la qualité et la stabilité de l'offre.
L'année 2023 sera marquée par plusieurs chantiers d'importance pour la stratégie globale de l'établissement. Il a été décidé de transférer à l'Afpa plusieurs missions sur la politique du titre professionnel du ministère du travail, aujourd'hui assurées par les services déconcentrés – édition des diplômes, habilitation des jurys, traitement des décisions de recevabilité des VAE et des équivalences entre diplômes. Compte tenu des contraintes financières qui continuent de peser sur l'Afpa, je continue de m'interroger sur l'ambition que nous nous donnons collectivement pour le service public de la formation professionnelle et pour l'Afpa.
Cette situation est d'autant plus problématique que les besoins sont là et que l'Afpa est en mesure de regagner du terrain, puisqu'elle est choisie pour répondre à des commandes. L'Afpa avait initié un PSE débouchant sur des départs massifs. Le tribunal de Bobigny a souhaité que ce PSE soit accompagné d'une demande d'évaluation des risques psychosociaux et d'un plan de prévention des risques professionnels. Je souhaiterais que vous puissiez faire un état des lieux après ce plan social.
Nous assistons à une fragmentation du secteur de la formation, avec près de 80 000 acteurs, mais aussi à une précarisation de ces métiers. Comment envisagez-vous l'évolution de ces métiers et le rôle que l'Afpa peut jouer en la matière ? Comment envisagez-vous également l'évolution du « marché de la formation » dans le contexte de réforme qui touche à la situation, à l'indemnisation, à l'accompagnement et à la formation des personnes privées d'emploi ? J'ai bien entendu le caractère concret des besoins à prendre en compte autour de la formation, que vous avez évoqué. Quelle place imaginez-vous demain et comment envisagez-vous la mise en œuvre de France Travail ? Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet ?
Enfin, quels sont les ingrédients à réunir pour consolider l'Afpa et lui permettre de continuer à honorer en propre ses missions de formations qualifiantes à l'heure où la mode est à la formation à la tâche, au-delà de sa stratégie de mise en synergie de différents acteurs de la formation ?