Nous allons tenter de faire un peu de pédagogie sur l'effet cliquet des textes successifs, lequel rogne peu à peu les libertés publiques et individuelles.
Face au développement de la vidéosurveillance et de la collecte de données, la CNIL devait représenter une garantie pour les citoyens, en leur assurant la possibilité de consulter les données qui les concernent et de s'opposer à leur conservation. Ensuite, le législateur a instauré des exceptions suspendant l'application de cette garantie. La loi de 1978 prévoit des obligations d'information du public lorsqu'une caméra est installée dans un lieu public, mais on imagine sans peine que cette disposition trouve beaucoup moins à s'appliquer si la caméra est embarquée dans un drone – sauf à lui attacher une banderole, semblable à celle des avions publicitaires, sur laquelle serait écrit « Souriez, vous êtes filmés ». Lors de l'examen du projet qui est devenu la loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés, nous nous étions posé la question de l'information du public sur la présence des drones : le texte prévoyait que le site du ministère de l'intérieur préciserait les heures de circulation de ses drones dans telle ou telle aire géographique, mais cette garantie a disparu dans la seconde mouture du texte, rendue nécessaire par la censure du Conseil constitutionnel. La loi dispose simplement que le ministère doit publier le nombre de drones qu'il achète ; le législateur a déjà reculé sur l'information concernant l'activité des drones, au motif que, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les terroristes ne doivent pas savoir qu'ils sont filmés. Il y a là un problème démocratique majeur.