Intervention de Jean-Philippe Tanguy

Réunion du jeudi 2 mars 2023 à 17h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Philippe Tanguy :

Vous avez choisi d'axer votre propos uniquement sur vos responsabilités dans la situation de la production d'électricité. Vous n'avez pas fait mention de votre bilan, comme directrice de cabinet, ministre, puis Première ministre, sur la situation du pétrole et du gaz, deux domaines particulièrement importants et édifiants sur le manque de souveraineté énergétique de la France. Quels sont vos commentaires sur les stratégies que vous avez conseillées depuis au moins huit ans ?

Mme Royal a notamment mis en place une taxation sur le diesel, le fioul et le gaz depuis maintenant huit ans. Quel bilan tirez-vous de cette politique sur la réduction de la consommation des énergies fossiles en France, en particulier pour les ménages modestes et moyens ? Estimez-vous que cela a limité notre exposition à la dépendance envers ces énergies fossiles, compte tenu du déficit commercial et énergétique record que nous enregistrons aujourd'hui, avec des prix du baril de pétrole qui ne sont pas, eux, records, par rapport à d'autres années que nous avons connues par le passé, même s'ils sont à un niveau élevé ?

Sur le gaz, je n'ai pas retrouvé, mais c'est une question ouverte, de position de votre part sur l'exposition du continent européen et donc indirectement de la France à la Russie, notamment des positions de votre part ou de madame Royal sur la mise en place de Nord Stream 1 et 2. Aux responsabilités, avez-vous manifesté et conseillé des politiques pour limiter cette exposition de nos alliés allemands et, d'une manière générale, de l'Europe à la Russie ?

Sur la production d'électricité, vous avez énormément mentionné le rôle de RTE et de ses prévisions dans les choix politiques qu'a fait la France, des choix que vous avez, soit conseillés, soit mis en place, tout en disant, je cite, regretter le manque de capacités prospectives de nos administrations : « Cela rend modeste sur les prévisions ». Or, vous continuez à faire reposer votre politique uniquement ou essentiellement sur les prévisions de RTE. Vous les opposez généralement au Parlement comme une référence incontestable, qui se suffit à elle-même, comme un argument d'autorité.

Or, vous venez de dire sous serment qu'il ne s'agit pas d'un argument d'autorité. Je ne conteste pas que ces scénarios existent et soient fondés sur des experts et des personnes qui méritent le respect, mais ce n'est, si je comprends bien, pas une référence incontestable. Par ailleurs, ce n'est pas non plus une référence incontestée. Il est faux de dire que face aux prévisions de RTE, d'autres experts, y compris au sein des administrations, d'EDF et des oppositions politiques, n'aient pas toujours contesté les prévisions de RTE.

La raison est simple : quand vous établissez le rôle du traité de Paris dans un changement de politique climatique et environnementale, vous dites vous-même que nous sommes passés du facteur quatre à l'objectif zéro carbone. Certes, mais il n'est pas besoin de faire Polytechnique pour savoir que, même avec un facteur quatre, cela enclenche des changements de modes de chauffage, de modes de production industrielle et de mobilités qui impliquent une électrification massive, sauf si vous avez une autre solution que j'ignore. Elle est certes d'un ordre moindre que le zéro carbone, mais elle n'est pas négligeable. Je ne comprends donc pas, vous qui parlez de manque de capacité prospective, comment, comme conseillère puis décideuse, vous ne pouvez pas savoir que cela nécessite plus de production d'électricité bas carbone.

Par ailleurs, je n'ai pas compris comment vous pouvez éviter l'effet falaise dès les années 2010 sans lancer de manière plus rapide des programmes nucléaires. Vous indiquez un délai minimal de quinze ans, mais les experts disent tous que ce délai peut malheureusement être plus long. Est-il de bonne politique de ne pas avoir lancé plus tôt un programme pour renouveler tout ou partie du parc nucléaire ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion