Intervention de Arnaud Montebourg

Réunion du mercredi 1er mars 2023 à 16h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Arnaud Montebourg, ancien ministre du redressement productif (2012-2014) :

Je suis arrivé à l'Élysée en indiquant être contre cette acquisition par General Electric, en soulignant que nous avons les moyens de la bloquer et en proposant pour cela de bloquer la vente et d'ouvrir la discussion avec les Allemands et les Japonais. J'ai été désavoué par le président de la République, qui a décidé que l'accord avec les Américains se ferait. Mais à la question subsidiaire de savoir selon quelles modalités conclure cet accord, j'ai répondu vouloir la nationalisation de la partie d'Alstom qui nous resterait, trois co-entreprises, le rachat de la signalisation ferroviaire et des pénalités si General Electric ne créait pas les mille emplois figurant dans l'accord. General Electric, n'ayant pas créé ces emplois, a payé ces pénalités, et grâce à cette clause, 50 millions d'euros sont ainsi allés à Belfort où ils ont été investis. C'est le seul point de mon accord qui a été appliqué.

Les rapports avec l'Élysée sont des rapports de travail, des rapports de force, mais c'est normal.

Ce qui s'est joué ce jour-là est très important. Veuillez considérer qu'en quinze ans nous avons perdu Arcelor, leader mondial de l'acier ; Péchiney, leader mondial de l'aluminium ; Alstom, un des leaders mondiaux de l'énergie ; Technip, un des leaders de la gestion de projets et de l'ingénierie pour l'industrie de l'énergie ; Lafarge, cimentier donné aux Suisses ; Alcatel, détruit et vendu à Nokia alors que nous aurions pu racheter Nokia – et je ne vous parle même pas d'Essilor. Et on ressort mon décret quand Carrefour risque d'être racheté par Couche-Tard !

Il faut se réveiller. Votre commission d'enquête s'interroge sur notre souveraineté. Si vous perdez tous ces groupes en quinze ans, il ne faut pas s'étonner qu'il n'y ait plus de PME en France, alors que les PME travaillaient pour ces groupes. Cela étant, on accuse les gouvernements, mais disons donc un mot, aussi, des présidents de ces sociétés. Le tarif de la trahison de la France est compris entre 10 et 15 millions d'euros : M. Kron a touché, je crois, 13 millions, M. Lafont, l'ancien président de Lafarge, 15 millions, tel autre 13 millions… Tel est le prix de la trahison de la France et ce n'est pas cher. Cela aussi fait partie des questions qu'il faut poser : il n'y a pas que le gouvernement, il y a aussi les dirigeants de ces entreprises. Cela dit, si on prend un décret, c'est pour s'en servir.

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