Je souhaiterais revenir sur le contexte. Mon collègue Colombani a rappelé que, effectivement, après l'agression dont Yvan Colonna a été victime, des femmes et des hommes, en Corse, tous bords politiques confondus – j'insiste sur ce point –, ont émis un certain nombre d'hypothèses, qui relevaient de la théorie du complot. C'est important de le rappeler. Je suis le seul député non nationaliste de la Corse dans cette assemblée, puisque je fais partie de la majorité présidentielle. Mon parcours politique s'est inscrit uniquement dans la famille de la droite républicaine et j'ai vécu cette histoire – nous venons de commémorer le vingt-cinquième anniversaire de l'assassinat du préfet Érignac – en tant que militant, non nationaliste. Cette commission d'enquête a pour vocation de faire des préconisations, mais elle a aussi une vocation politique et citoyenne majeure.
Vous le savez, les rapports entre la Corse et l'État ont parfois été conflictuels. La justice a démontré que des agents de l'État ont pu commettre sur l'île des fautes lourdes, des délits, voire même des crimes. Dans le cœur des Corses, nationalistes ou pas, cela a laissé de nombreuses meurtrissures.
Vous avez été chef du Gouvernement de notre pays, mais aussi secrétaire général adjoint de la présidence, sous Nicolas Sarkozy. Que pouvez-vous répondre aux braves gens qui, de bonne foi, en Corse et ailleurs, considèrent que les événements qui se sont produits le 2 mars 2022 à Arles ont été permis, d'une manière ou d'une autre, par le pouvoir politique ou administratif ? Pour ce qui est du judiciaire, indépendant dans notre pays, il rend des décisions souveraines au nom du peuple français. Je me suis cependant fait à l'idée – je suis avocat de profession – que certaines décisions de justice revêtaient un caractère assez particulier, notamment pour maintenir certains statuts, eu égard à la gravité extrême des faits commis, que personne ne nie.
Des troubles graves à l'ordre public se sont produits ; j'étais maire d'Ajaccio à l'époque et il s'en est fallu de très peu, selon moi, pour que des drames irréparables n'aient lieu dans la période qui a suivi l'agression d'Yvan Colonna. À la lumière des responsabilités éminentes que vous avez exercées au service de l'État, pouvez-vous nous confirmer qu'il n'y a pas eu – la répétition peut avoir des vertus pédagogiques –, à votre connaissance, d'intervention politique, administrative, de ce que certains appellent parfois « l'État profond » pour permettre la survenance de cet événement dramatique ?