Intervention de Sébastien Lecornu

Réunion du mardi 24 janvier 2023 à 17h05
Commission de la défense nationale et des forces armées

Sébastien Lecornu, ministre :

Le débat est noble, mais il a parfois lieu de manière curieuse sur les réseaux sociaux. J'aime autant que ce soit de manière posée, comme vous l'avez fait au sein de la commission.

Vous reconnaissez que de nombreuses missions sont nécessaires. Lorsque nous examinerons en détail à quoi sont affectés les 413 milliards d'euros, vous verrez qu'ils correspondent à celles que vous avez évoquées. Et, malheureusement, c'est assez cher car il faut faire face à des sauts technologiques puissants et rapides, mais aussi acheter français ou européen. Ne pas s'équiper à Pékin, Moscou ou Washington a un prix, mais j'appelle à l'unité sur ce sujet. Des pays peuvent certes afficher plus de matériels à un prix inférieur, mais c'est tout simplement parce qu'ils n'ont pas d'industrie nationale.

Je sais que vous êtes un défenseur de l'emploi, notamment ouvrier. Si depuis les années 1960 les gaullistes et les communistes ont toujours été opposés sur la dissuasion nucléaire et sur les alliances, ils ont su se retrouver autour des arsenaux. Il faut dire la vérité aux Français et leur expliquer à quoi correspond ce budget de 413 milliards d'euros en termes de missions, mais aussi de souveraineté industrielle.

Nous ne sommes pas d'accord, mais je respecte vos opinions politiques et votre opposition à la dissuasion nucléaire – qui correspondent à la position constante du Parti communiste français et à ses votes sur toutes les précédentes LPM.

Notre diplomatie est claire : il n'y a aucune volonté de compétition ou d'agressivité de la part de la France envers ses voisins. Nous sommes parfois offensifs, mais c'est au sujet du climat. La France est une puissance d'équilibres, qui essaie de rétablir le multilatéralisme à travers des enceintes comme les Nations unies, l'OTAN ou l'UE.

Le véritable clivage oppose désormais ceux qui pensent que des menaces réelles pèsent sur la nation française et ceux qui considèrent au fond qu'elles sont virtuelles. C'est la difficulté à laquelle je me heurte en tant que ministre des armées, une fois passée l'émotion du début du conflit en Ukraine. Lorsque l'on annonce qu'il faut investir dans les domaines du cyber et de l'espace et reconstituer les stocks de munitions, je vois bien que certains pensent que face au danger on n'en fait pas assez et pas assez vite. D'autres personnes ne comprennent pas pourquoi il faut donner autant d'argent aux armées, car elles estiment que nous sommes protégés ou que la France ne sera pas immédiatement concernée par un conflit.

Il est donc particulièrement important de s'accorder au moins sur les risques et les dangers à l'occasion de l'examen de la LPM, car cela dimensionne notre outil militaire.

On ne peut pas attendre de nos soldats qu'ils fassent preuve d'un courage invraisemblable si nous ne les soutenons pas suffisamment. La société évolue et l'acceptation du statut militaire par les jeunes soldats passe désormais par des infrastructures en meilleur état qu'il y a vingt ou trente ans. C'est également vrai en ce qui concerne le niveau technologique des armements, qui doit susciter l'intérêt du combattant. Si nous demandons beaucoup à nos soldats, nous avons le devoir de bien les équiper. Tout se tient et j'essaierai de le démontrer.

Vous avez cité la réforme des retraites. On a tort d'opposer entre eux les budgets de la nation. Ce n'est pas ce que vous avez dit, je le précise, mais je l'ai vu sur les réseaux sociaux.

Opposer la réforme des retraites au budget des armées revient à entamer l'acceptabilité par la société des efforts que l'on accomplit pour nos soldats et pour assurer notre sécurité commune. C'est également inadéquat au regard de ce que nous demandons aux militaires.

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