J'aimerais commencer en évoquant un souvenir personnel. En novembre 2020, lorsque mon médecin m'a confirmé que j'étais enceinte de quelques semaines, mon premier réflexe a été de lui demander si j'aurais le droit de l'annoncer à ma famille à Noël. J'avais la chance de me trouver face à un médecin qui comprenait que, pour moi, la période des trois premiers mois constituait un tabou – « trois mois sous silence » pour reprendre l'expression de Judith Aquien. Elle m'a répondu, avec beaucoup de bienveillance, que je pouvais faire comme je l'entendais et l'annoncer à qui je voulais, en me précisant cependant que si je faisais une fausse couche je devrais aussi l'annoncer à ces mêmes personnes. J'ai aimé cette bienveillance.
Quelques minutes après, nous avons évoqué les formalités administratives. S'agissant du formulaire destiné à la sécurité sociale, elle m'a dit que nous avions un peu de temps, qu'il était possible de le remplir jusqu'à la fin du troisième mois, parce que, de toute façon, la couverture par l'assurance maternité ne commence qu'à partir du début du sixième mois. C'est en effet seulement à partir de ce moment-là que l'on considère que tous les soins, notamment ceux liés à la grossesse, doivent être pris en charge intégralement.
J'ai alors pensé que, si je faisais une fausse couche avant ce jour-là, la sécurité sociale ne me considérerait même pas comme ayant été enceinte. Je me suis également dit que, s'il arrive quoi que soit, avant le sixième mois, à une femme qui n'a pas la chance, comme moi, d'avoir une mutuelle, elle ne sera pas prise en charge à 100 % et devra payer ses soins de sa poche.
Nous avons beaucoup parlé ici ce soir du tabou que constituent les premiers mois de la grossesse. À cet égard, l'absence de couverture des femmes dès le premier jour de la grossesse m'apparaît symbolique. En laissant se développer l'idée que, pendant les trois premiers mois, les femmes enceintes n'existent pas en tant que telles – puisque c'est ce que considère la sécurité sociale –, on entretient ce tabou. D'autre part, cette situation donne lieu, évidemment, à une injustice matérielle et représente un risque pour les femmes. La fausse couche, dont nous avons tant parlé ce soir, n'est pas prise en charge à 100 % avant le sixième mois puisque la couverture ne commence qu'à ce moment-là.
Par cet amendement, nous demandons simplement que soit remis un rapport sur l'extension de la couverture à 100 % prévue par l'assurance maternité au premiers jours de la grossesse.