S'agissant de la possibilité d'associer l'enfant à l'exercice de son droit à l'image dès que sa capacité de discernement le permet, les parents devraient privilégier l'écoute et l'obtention de l'avis de leur enfant quant aux limites à ne pas franchir. Ils favoriseraient ainsi le sentiment d'autonomie de l'enfant et, surtout – j'y insiste –, le développement d'une estime de soi positive, absolument nécessaire à son plein épanouissement. En ce sens, le rétablissement d'un article 372-1 du code civil me paraît une bonne chose, même si cette disposition, consacrée spécifiquement au droit à l'image des enfants, fait double emploi avec la nouvelle version proposée pour l'article 371-1 du même code.
Néanmoins, face à la banalisation du sharenting, face aux dérives de certains parents qui semblent pris d'une frénésie absolue de publication et face à ceux qui se livrent à des mises en scène allant jusqu'à l'humiliation – vous avez évoqué, monsieur le garde des sceaux, le cheese challenge, viral sur TikTok –, il est malheureusement nécessaire de faire acte de redondance afin de préciser les choses clairement et une fois pour toutes, de façon que nul n'ignore que les enfants ont un droit à l'image et un droit à la vie privée. Face à l'ampleur de ce phénomène et aux conséquences potentiellement dramatiques de la diffusion inconsidérée d'images d'enfants par leurs parents, nous, législateurs, nous devons protéger les enfants par tout moyen. L'intérêt supérieur des enfants s'accommodera de cette rédaction.
S'il est in fine adopté, le présent texte ne réglera bien évidemment pas tous les problèmes ; il ne rendra pas à certains parents l'intelligence du cœur qui leur manque tant, mais il aura au moins le mérite de rappeler à tous que l'enfant est non pas un objet, mais une personne, et qu'à ce titre, s'il a des obligations, il a également et surtout des droits, dont le droit au respect de son image et le droit à la vie privée, fondamental pour sa propre construction.