Venons-en aux articles. Je vous ai dit à plusieurs reprises que nous nous opposerions à l'article 1er par cohérence et par fidélité à la position et aux valeurs que la majorité a toujours défendues, mais aussi par pragmatisme, parce que les mesures proposées par le texte sont inefficaces. Par cohérence aussi, nous repousserons l'article 2, comme nous y invite elle-même la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Certains critiquent l'expertise du Sénat en matière de collectivités, mais ce n'est pas mon cas, et, selon Mme Françoise Gatel, les élus n'ont pas besoin d'être informés de toutes les décisions judiciaires rendues à la suite d'infractions causant un trouble à l'ordre public commises dans leur territoire.
M. le garde des sceaux nous a expliqué, par ailleurs, que les procureurs seraient paralysés par la nécessité de communiquer ces informations. En outre, cette disposition ne dit rien des procédures non définitives : dans le cas d'un jugement suspensif en matière pénale, lorsque l'appel est pendant, à quel moment la décision judiciaire devrait-elle être communiquée au maire, et quelle décision ? Faudrait-il lui expliquer que tel individu a été condamné en première instance, mais qu'il a fait appel et qu'il ne l'est donc pas de manière définitive ? Cette mesure introduirait de la confusion et n'aurait donc aucun intérêt.
S'agissant des Spip, nous avons déjà évoqué leur désorganisation. À supposer qu'un délinquant ait commis une infraction à l'encontre d'un membre des forces de l'ordre pour laquelle vous voulez instaurer une peine plancher, ce délinquant ferait sans doute l'objet d'un mandat de dépôt. Dès lors, il serait absurde, alors même qu'on prépare son incarcération, de le maintenir dans les locaux du tribunal pour préparer sa réinsertion. En toute logique, le Spip doit intervenir uniquement dans les locaux de l'administration pénitentiaire.
Quant à la conférence de consensus de lutte contre la récidive que vous voulez organiser en 2023, je rappelle qu'avec tous les magistrats de France et de multiples personnalités, nous venons de passer un an à imaginer la justice de demain. Ni les avocats, que vous connaissez bien, ni les magistrats, ni les Spip, ni les autres acteurs du monde judiciaire n'ont demandé la réintroduction des peines planchers – aucun d'entre eux !