La mer Méditerranée est un cimetière à ciel ouvert, mais la France et l'Europe préfèrent regarder ailleurs. Dimanche 26 février, il y a quelques jours, plus de soixante personnes, dont douze enfants, ont trouvé la mort dans le naufrage de leur embarcation en Italie du Sud. Nous parlons bien de soixante morts et d'enfants noyés, madame la secrétaire d'État. Quelle a été la réaction de la France ? Aucune : pas un communiqué, pas un tweet des membres du Gouvernement ni du Président de la République, pourtant si prompts à réagir sur tous les sujets.
La France est une terre d'immigration et une terre d'accueil ; elle doit le rester. Ceux qui traversent la Méditerranée au risque de leur vie méritent que la fin de leur voyage soit digne du statut de notre pays – qui compte, rappelons-le, 10 % d'immigrés. Assurer un accueil digne nous impose d'améliorer nos conditions d'intégration, pour que nous puissions faire société. J'espère que le projet de loi que nous examinerons bientôt en sera l'occasion – vous pouvez compter sur les députés du groupe Écologiste – NUPES pour formuler des propositions en ce sens.
L'accueil digne doit aussi passer par une politique de régularisation de tous ceux qui travaillent dans notre pays. En 2022, la France a délivré plus de 320 000 premiers titres de séjour, en augmentation de plus de 17 % par rapport à 2021. Les régularisations de travailleurs sans-papiers ont crû de 29 % : sur un total de plus de 34 000, 11 000 avaient pour motif le travail. Nous semblons donc aller dans la bonne direction. Vous avez fait un pas supplémentaire en ouvrant la porte à une régularisation des travailleurs sans-papiers occupant des métiers en tension, mais vous rétropédalez à présent en parlant de quotas.
M. Darmanin, qui dit tant aimer le travail et les travailleurs, et qui rappelle souvent les origines modestes de sa mère, aurait été heureux d'apprendre que la mienne était agent d'entretien dans un hôpital. Je n'ai pourtant pas le souvenir de l'avoir vu dans les défilés du 1er mai ou à la sortie des usines ! Ce n'est pas grave ; il est ministre de l'intérieur, il peut faire mieux, comme vous pouvez faire mieux : régularisez le million de travailleurs sans-papiers qui se trouvent dans notre pays et qui font tourner nos chantiers et nos restaurants. Vous trouverez alors les quelques milliards d'euros qui manquent pour équilibrer le système de retraite en 2030, au lieu d'épuiser nos compatriotes au travail, ou de céder aux fantasmes natalistes et empreints de racisme du Rassemblement national.
Nous nous trouvons à un tournant majeur de notre politique migratoire. Ma question est simple : êtes-vous prêts à engager une politique massive de régularisation des travailleurs sans-papiers ?