J'ai été choquée, et même attristée lorsque j'ai pris connaissance du titre de votre proposition de loi et de son premier article, d'autant que je ne m'attendais pas à ce que vous souteniez un texte s'attachant à lutter contre la récidive tout en prônant le retour aux peines plancher, dont on connaît la dureté et l'inefficacité. L'axe de votre proposition de loi ne sera pas de sanctionner, d'informer, d'accompagner et d'anticiper, mais de soutenir le populisme pénal, permettant à l'extrême droite de proposer des mesures à la fois sécuritaires et dangereuses, quoique inefficaces et accroissant même la récidive.
Votre proposition de loi comporte un angle mort important, celui des peines alternatives, dans un contexte où les sorties sèches représentent dans notre pays environ 80 % des sorties de prison et livrent les anciens détenus à eux-mêmes, sans ressources ni liens sociaux. Une systématisation des programmes de prise en charge des condamnés bénéficiant d'une libération sous contrainte est certes prévue, mais elle n'en précise aucunement les contours, bien que l'efficacité de la liberté conditionnelle dépende de son insertion au sein d'un parcours de retour progressif à la liberté amorcé lorsque le condamné est encore écroué.
Votre proposition de loi reste muette sur le manque criant de moyens humains et financiers dédiés à la justice pénitentiaire, et ce malgré le rapport d'octobre 2022 de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice, lequel confirme que, à PIB comparable, la France fait partie des pays qui investissent le moins dans le système judiciaire. Vous abordez en outre la question des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP), qui ont avant tout besoin de moyens budgétaires, matériels et humains. En 2016, ils n'étaient que 2 300 pour suivre les 165 000 personnes en milieu ouvert et les 11 000 personnes sous bracelet électronique.
Veiller à l'efficacité du travail des CPIP implique une vigilance quant à leur recrutement – les juristes étant plus nombreux que les assistants sociaux parmi les reçus au concours – ainsi qu'un retour à l'essence de cette profession qui valoriserait leur expertise.
L'objectif poursuivi par l'article 2 se heurte d'autre part à une impossibilité technique, du moins au regard de cette sorte de course à l'inflation carcérale à laquelle nous devrions tourner le dos.
Votre proposition me semble dangereuse dans une période comme la nôtre ; aussi notre groupe s'y opposera-t-il.