Proposition de loi pour lutter contre la récidive et pour une justice plus efficace, avez-vous dit, madame la rapporteure.
Premièrement, vous partez de certains postulats, notamment de l'idée que les peines plancher sont efficaces dans la lutte contre la récidive. Vous avez évoqué la conférence de consensus de 2013 sur la prévention de la récidive. Aujourd'hui, nous savons à peu près tout sur la récidive. La seule bibliographie fournie à l'issue de la conférence de consensus fait 140 pages et prouve, par le biais de multiples études internationales, que les peines plancher ne fonctionnent pas dans la lutte contre la récidive. Depuis lors, d'autres études ont complété cette bibliographie. Toutes vont dans le même sens.
Vous partez d'un autre postulat, qui est aussi un constat et figure dans l'exposé des motifs : l'une des causes de la récidive est la surpopulation carcérale. Vous avez parfaitement raison, mais votre proposition de loi, même si elle vise des cas précis, aura pour effet d'envoyer davantage de gens en prison. Votre texte contredit l'exposé des motifs.
Deuxièmement, même si la peine plancher n'est pas automatique, même si le juge peut y déroger, elle fait en sorte que le juge cesse d'être le seul à apprécier les conditions dans lesquelles le délit a été commis et la personnalité de l'individu. Elle contredit donc le principe d'individualisation des peines, qui est un élément fondamental de notre droit.
Par ailleurs, je suis surpris que vous teniez si peu compte de l'avis des premiers concernés que sont les professionnels de la justice. Vous proposez l'expérimentation de la présence des SPIP dans les juridictions. On expérimente beaucoup, dans ce gouvernement ; on expérimente la réforme de la police judiciaire, la vidéosurveillance et l'intelligence artificielle en prévision des Jeux olympiques et paralympiques, et on sait presque d'avance que les expérimentations entreront dans le droit commun. La notion même d'expérimentation est donc suspecte.
En outre, pourquoi ne pas écouter ce que disent les professionnels de cette proposition d'expérimentation ? « Il nous semble donc urgent de ne pas retenir un tel article, qui aura pour conséquence de mobiliser les SPIP sur l'intervention chronophage et coûteuse en ressources humaines, sans aucun lien avec leur mission initiale de milieu ouvert, ni aucune plus-value en termes de lutte contre la récidive », dit la CNDPIP. Prenez appui sur l'avis de ceux qui font et qui sont sur le terrain au lieu de présenter une proposition de loi allant totalement à l'encontre des intérêts des professionnels et de la prévention de la récidive qu'elle prétend servir !
S'agissant de la conférence de consensus, vous faites les choses à l'envers. La conférence de consensus sert à faire le point sur un sujet, à tirer des conclusions et à faire des propositions. Vous, au contraire, vous faites une proposition de loi avant de réunir une conférence de consensus pour faire le point. Tout cela est monté à l'envers.
Nous ne soutiendrons pas la proposition de loi.