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Intervention de Timothée Houssin

Réunion du mercredi 15 février 2023 à 9h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaTimothée Houssin :

L'action de groupe permet à des consommateurs victimes d'un même préjudice de la part d'un professionnel de se regrouper et d'agir en justice, par le biais d'une association. Il s'agit donc de protéger nos concitoyens contre des entreprises qui, plus puissantes qu'eux, disposent de moyens financiers plus élevés et sont épaulées par des armées d'avocats.

Dès l'instauration des actions de groupe par la loi du 17 mars 2014, notre pays a cherché son propre modèle pour renforcer les droits des citoyens, sans tomber dans les dérives de class actions américaines. Force est de constater que cet équilibre n'a pas encore été trouvé. La mission d'information que vous avez dirigée a eu le mérite de faire le bilan de ces actions de groupe à la française et de proposer des améliorations concrètes, pour les rendre plus efficaces et réellement opérationnelles.

Le régime de l'action de groupe a déjà pu évoluer, notamment grâce à la loi du 18 novembre 2016, qui l'a étendue aux discriminations au travail, aux questions environnementales, au respect des données personnelles, puis aux préjudices subis dans le cadre de locations immobilières. Ces élargissements auraient dû provoquer une forte augmentation du nombre de ces actions et un renforcement des droits des consommateurs. Or, votre rapport d'information montre l'inverse : trente-deux actions de groupe seulement ont été intentées depuis 2014, dont vingt dans le domaine de la consommation ; et parmi elles, seules six ont prospéré – trois à la suite d'une déclaration de responsabilité du défendeur, et trois autres d'un accord amiable.

Un si faible taux de réussite nous oblige à parler d'échec et, par conséquent, à agir. Aujourd'hui, ce sont des centaines, parfois des milliers de nos concitoyens qui sont victimes de préjudices, sans jamais pouvoir en obtenir réparation en justice. C'est aussi un très mauvais signal envoyé à une infime minorité d'entreprises malintentionnées qui, conscientes de n'être pas menacées par ces actions, persévèrent sans remords dans leurs pratiques frauduleuses.

En matière de santé, de nombreuses affaires judiciaires, dont certaines sont devenues célèbres, révèlent l'étendue des dégâts et mettent en lumière la nécessité de disposer d'actions de groupe plus simples et plus efficaces. C'est le cas notamment de l'affaire du Mediator, qui a fait plus de 5 000 victimes, ou encore celle des implants mammaires PIP – Poly Implant Prothèse –, où l'on a pu dénombrer 1 700 plaignantes.

Les actions de groupe en matière de protection des données personnelles prendront de plus en plus d'importance au sein de notre système judiciaire, mais elles demeurent largement insuffisantes. Ainsi, seules deux actions ont été engagées à ce jour, contre Facebook et Google, pour non-respect du RGPD – règlement général sur la protection des données.

Une procédure d'action de groupe plus efficace permettrait de mieux rendre justice et de mieux réparer les préjudices subis.

Nous nous félicitons que des mesures aient été prises pour permettre aux plaignants d'obtenir une réparation de l'intégralité du préjudice et qu'un seuil de plaignants en association puisse suffire à lancer une action. Le seuil fixé par votre proposition initiale, à savoir cinquante personnes, nous paraissait déjà un peu élevé ; en le portant à cent, comme y tendent des amendements des rapporteurs, vous affaibliriez d'autant plus, malheureusement, la portée du texte.

Bien qu'il soit largement proposé de le modifier, à travers des amendements des rapporteurs et de certains autres – je pense par exemple à celui, déposé par nos soins, relatif au Conseil national des barreaux –, nous en proposerons d'autres encore pour ouvrir la discussion sur certains points, s'agissant notamment du montant minimal des sanctions prononcées, que nous voulons, après ajout des dommages et intérêts, au moins égal à celui des profits réalisés.

Pour préserver l'équilibre de l'action de groupe à la française, nous proposons également de faciliter l'intégration des collectivités locales. Enfin, nous veillerons à ce que ne puissent être intentées des actions de groupe qui pourraient avoir pour seul objectif de nuire à la réputation d'une entreprise.

Le groupe Rassemblement national votera donc en faveur de cette proposition de loi, qui va dans le sens d'un meilleur accès à la justice.

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