La subtilité des nouvelles stratégies d'influence tient au fait qu'elles n'ont plus nécessairement besoin d'être secrètes. L'ingérence peut se définir comme une immixtion dans des réseaux pour essayer de changer le cours d'une politique. L'influence a un champ d'action plus large, qui peut s'adresser à des publics sans forcément essayer de pratiquer l'entrisme, en agissant sur le temps long. De fait, l'influence peut faciliter l'ingérence : il y a un continuum. Si un public tient pour acquis que son système est mauvais et que d'autres sont plus justes, il sera d'autant plus manipulable par des stratégies d'ingérence qui lui demanderont ensuite différents services.
Il est également possible de considérer que l'influence relève plus du soft power et l'ingérence de l'espionnage. Le modèle d'analyse MICE utilisé dans le monde de l'espionnage et de l'intelligence résume ainsi les leviers utilisables pour conduire quelqu'un à trahir son pays et travailler avec un autre : le M correspond à l'argent, le I à l'idéologie, le C à la contrainte et le E à l'ego. Quelqu'un qui se laissera convaincre par un certain nombre d'influences ouvertes sera d'autant plus facilement manipulable par des actions beaucoup moins publiques.
Je le répète : certaines activités sont plus répréhensibles que d'autres, mais il existe une réelle continuité entre l'influence et l'ingérence.