On ne peut pas parler d'échec en matière d'énergies renouvelables puisque, en comparaison du nucléaire, les dépenses que l'on a engagées dans ce domaine ne représentent quasiment rien. Pour savoir ce que cela aurait donné, il aurait fallu déployer des énergies renouvelables plus ou moins intermittentes à partir de 1973, en supprimant le prix unique du kilowattheure, qui a ôté toute perspective de rentabilité aux solutions alternatives de production pendant des années. Or on n'a rien fait pendant vingt-cinq ans.
Pour ce qui est des transports, mon ministère ne finançait pas directement la SNCF et le transport ferroviaire, ni les transports publics et les grandes collectivités. En revanche, avec Jean-Claude Gayssot, nous avons inscrit des dispositions dans les contrats de plan en matière d'équipement et d'aménagement qui n'ont pas été suivies d'effet. Je vous rappelle que l'alternance a eu lieu en 2002. Je ne suis pas responsable de ce qui s'est passé ensuite.
Nous sommes toujours caricaturaux à l'égard de ce que font les Allemands. Je n'oublie pas que l'Allemagne part de beaucoup plus loin que la France. Elle recourt majoritairement au charbon et au gaz russe ; après la réunification, elle a dû moderniser entièrement un système de production très arriéré, ce qui a freiné ses efforts.
Un article du Monde, paru il y a trois jours, montre que, pour la première fois, les énergies renouvelables arrivent en tête des sources de production électrique de l'Union européenne : elles représentent 22,28 % du mix énergétique européen et dépassent ainsi, de manière inédite, le nucléaire, qui totalise 21,92 % de l'ensemble, ainsi que le gaz (19,91 %), le charbon (15,99 %) et l'hydraulique (10,12 %). L'Allemagne a dû accomplir des efforts particulièrement intenses puisqu'elle importait encore 60 % de son gaz avant la guerre en Ukraine. Le mix électrique ne représente qu'une petite partie des consommations. Le problème principal pour les Allemands est lié aux importantes émissions du secteur des transports. Je vous invite à lire cet article qui montre que les énergies renouvelables sont loin d'être marginales dans le mix européen. D'ailleurs, tous les pays européens respectent leurs engagements en matière de montée en puissance des énergies renouvelables, sauf la France.
Je n'ai certainement pas proposé de remplacer le nucléaire par du cycle combiné gaz, mais par « tout un bouquet de solutions », dont celle-là. Il y a quelques jours, on m'a accusée d'avoir encouragé le charbon, maintenant c'est le cycle combiné gaz. Je n'ai pas envie de polémiquer : lisez l'article de quatre pages où j'avance plusieurs solutions, qui doivent être utilisées concomitamment.
J'ai dû m'exprimer avec maladresse tout à l'heure sur la rente nucléaire : je voulais simplement dire que l'on avait choisi d'encourager des usages non prioritaires de l'énergie et de vendre le kilowattheure issu du nucléaire à un prix très bas, sans constituer de réserves permettant de financer les déchets, le démantèlement et la suite. Dans une entreprise, on prévoit, au moment de lancer un nouvel équipement, les investissements qui seront nécessaires pour l'étape suivante, mais nous ne l'avons pas fait. Nous avons vendu notre kilowattheure nucléaire à un prix politique, artificiellement bas.
Je constate comme vous que rien n'a été fait depuis vingt ans en matière de transports publics et de ferroutage, mais le programme national de lutte contre le changement climatique était riche, tout comme l'était la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Je regrette que l'on n'ait pas poursuivi ces efforts.
Il est amusant de demander à ceux qui proposaient de ne pas produire de déchets nucléaires ce qu'ils feraient pour les gérer. Néanmoins, un gouvernement totalement écologiste serait confronté à ce problème, donc je vais vous répondre. Les quantités de déchets nucléaires à traiter sont énormes. L'entreposage en subsurface est la solution la plus réversible si l'on trouve des techniques permettant de séparer et de retraiter plus efficacement. Orano vend des conteneurs aux États-Unis pour le stockage en subsurface qu'il ne propose pas en France. Le MOX n'est pas une bonne solution car il complique le traitement des déchets – j'ai évoqué le refroidissement en piscine tout à l'heure. Je crois comprendre qu'il n'est pas prévu de recycler ou de retraiter les combustibles MOX usagés, qui comportent beaucoup de plutonium, qu'il est complexe et cher de conteneuriser ; on le fait voyager à travers la France, de La Hague à Marcoule et de Marcoule au Japon. Par ailleurs, le temps de refroidissement est de l'ordre de trois siècles : si on regarde en arrière, cela nous ramène à Louis XV. Sommes-nous sûrs de la stabilité des sociétés humaines ?
Quand j'ai évoqué le torpillage de la filière photovoltaïque, je faisais allusion au fait qu'elle n'a pas été soutenue quand elle s'est trouvée en difficulté, contrairement à d'autres industries comme l'industrie navale. Nous avons donc accepté que tous nos panneaux soient produits en Chine.
Iter est un consortium international, financé pour moitié par l'Union européenne et par d'autres pays comme la Chine. On se félicite d'avoir provoqué une relation de fusion sur une ou deux molécules sans consommer plus d'énergie qu'on en a produit, mais il ne s'agit que d'une molécule dans un très petit espace. On n'intègre jamais le coût de construction de cet équipement de 440 000 tonnes de béton et d'acier. Il ne faudra pas oublier d'intégrer ces 440 000 tonnes au bilan énergétique du monstre, alors que la perspective de procéder à des premières expériences de fusion se situe à l'horizon 2070. Où en serons-nous en 2070 ? Il y a des programmes de recherche plus urgents que ce projet pharaonique et délirant, qui consommera énormément de ressources rares – le quart des ressources planétaires de niobium, par exemple.