Je voudrais d'abord mettre en perspective quelques chiffres. En 2022, 351 millions d'euros de fraude à la CAF ont été détectés ou évités sur près de 100 milliards d'euros de prestations versées, ce qui représente 49 000 cas sur un total d'environ 17 millions de bénéficiaires. Sans absoudre les fraudeurs, ces données factuelles montrent combien la fraude aux allocations est marginale ; si une estimation large de la fraude aux prestations sociales, toutes branches confondues, la situe autour de 2,4 milliards d'euros, cela reste un montant trente-trois fois moins important que celui de l'évasion fiscale, estimé à 80 milliards d'euros par an. Sur ces 80 milliards, seuls 14,6 milliards ont été mis en recouvrement en 2022, dont près de 9 milliards concernent des entreprises. C'est l'histoire des petits poissons qui focalisent opportunément toute l'attention, pendant que les gros requins se régalent.
Au moment où le Gouvernement croit pouvoir imposer à toutes et tous – mais cela n'arrivera pas – deux ans de travail supplémentaires, prétextant un déficit du système de retraite qui atteindrait 12,5 milliards d'euros en 2027, je souhaite attirer l'attention sur une fraude bien particulière. Dans sa fonction d'Observatoire du travail dissimulé, en novembre 2022, le Haut Conseil du financement de la protection sociale évaluait entre 7,3 et 9,2 milliards d'euros le manque à gagner en matière de cotisations sociales non versées par les entreprises, dont une part devrait précisément venir alimenter les caisses de retraite.
Voici donc ma question : à quel moment le Gouvernement va-t-il retrouver la raison en retirant son projet injuste et injustifié de retraite à 64 ans pour toutes et tous, pour le remplacer par une politique réellement volontariste permettant de récupérer l'argent là où il est, dans les poches de grandes entreprises qui ont les coudées franches pour optimiser, éluder, évader – bref, pour frauder ?