« Monsieur le député, pouvez-vous aider la famille X qui, ce soir encore, va passer la nuit dans sa voiture car il n'y a plus de places au Samu social ? » Cette phrase, je l'ai entendue trop souvent. Hier soir encore, mon assistant a été contacté par une directrice d'école qui cherchait un hébergement pour une famille avec deux enfants qui s'apprêtait à passer la nuit dans la rue.
Vous l'aurez compris, je vais vous parler de ces femmes, ces hommes et ces enfants qui dorment, vivent et mangent dans la rue.
Il y a un moins d'un mois, j'ai été alerté le même jour par deux familles avec trois enfants chacune qui dormaient dans la rue, à Caen. Grâce à la mobilisation des associations et des services de l'État, l'une d'elles a trouvé un hébergement pour la nuit ; l'autre non.
Tous les soirs, à partir de vingt heures, c'est le même combat pour toutes les associations et tous les collectifs, comme « AG de lutte contre toutes les expulsions », qui effectue un travail remarquable à Caen en offrant son soutien à ces familles. Un seul objectif pour les bénévoles : trouver les rares places disponibles dans les centres d'hébergement.
Les parlementaires que nous sommes sont désemparés face à la faiblesse des moyens de l'État pour offrir un refuge aux personnes en situation de détresse alors que les centres d'hébergement, parfois très vétustes, sont pleins à craquer. Il n'est pas acceptable de laisser les petits Nino et Giorgi, âgés respectivement de 3 et 5 ans, dormir dehors dans le froid. Il n'est acceptable non plus de laisser à la rue une femme seule avec trois enfants.
« La première bataille, c'est de loger tout le monde dignement. Je ne veux plus, d'ici la fin de l'année, avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois ou perdus. C'est une question de dignité, c'est une question d'humanité et d'efficacité. » Ces propos sont ceux du Président de la République, il y a six ans – une éternité. Car, depuis, la situation s'est encore dégradée. Le 115 du Calvados, géré par l'association des Amis de Jean Bosco, constatait cet hiver une hausse des appels, dont une centaine chaque soir ne pouvait être traitée avant que n'ouvre un squat, rue d'Auge, à Caen.
Si depuis la situation s'est légèrement améliorée, il faut reconnaître qu'à moyens constants, les recrutements sont difficiles et la hausse du nombre d'appels intenable. Alors qu'il avait un temps envisagé de diminuer de 40 millions d'euros les crédits affectés à l'hébergement d'urgence, entraînant une baisse du nombre de places d'hébergement à 193 000 pour 2022 et 186 000 fin 2023, le Gouvernement a finalement fait marche arrière et stabilisé ces crédits. Mais force est de constater que cet effort est insuffisant, que ce soit pour les personnes en détresse et les personnels des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO).
Madame la secrétaire d'État, qu'attendez-vous pour réquisitionner les logements vacants et ouvrir davantage de places d'hébergement ? Pouvez-vous nous indiquer combien de personnes, chaque soir, n'obtiennent pas une réponse positive du 115 ? Pourquoi ne proposez-vous pas aux familles avec des enfants des places dans des hôtels, le temps d'ouvrir les places d'hébergement d'urgence ?