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Intervention de Olivia Grégoire

Réunion du mercredi 1er février 2023 à 15h00
Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation

Olivia Grégoire, ministre déléguée, chargée des PME, du commerce, de l'artisanat et du tourisme :

Les territoires sont une priorité de mon ministère. Le périmètre dont j'ai la charge intègre les collectivités territoriales. Je suis en charge des PME, du commerce, de l'artisanat, du tourisme, mais également des indépendants, des professions libérales et de la consommation. Ce ministère est donc celui de l'économie de la proximité et du quotidien.

Depuis près de huit mois à la tête de ce portefeuille, je m'efforce de répondre à tous les élus des petites, des moyennes et des grandes collectivités urbaines, rurales, de montagne et de littoral, car toutes ont des problématiques de tourisme, de commerce, d'artisanat, de tissu économique et de PME. Je sais combien un supermarché, un boulanger ou une petite église peuvent avoir un rôle absolument déterminant dans l'attractivité ou la résilience d'un territoire. Ces lieux économiques, de vie et de sociabilité reposent parfois sur une seule personne, et achoppe quelquefois sur un seul problème.

Je suis particulièrement attentive aux remontées de terrain qui peuvent être faites directement par les collectivités ou par les associations d'élus, afin d'y apporter des réponses rapides. Je m'efforce d'associer au mieux les associations d'élus dans chacun des grands axes politiques publiques dont j'ai la charge. Je mène ce travail au quotidien avec l'ensemble des associations d'élus locaux : Régions de France, Départements de France, l'Association des maires et présidents d'intercommunalité de France (AMF), Intercommunalités de France, France urbaine, l'Association des petites villes de France (APVF) ou encore l'Association des maires ruraux de France (AMRF). Je ne conçois pas une politique du tourisme et une politique du commerce qui n'associeraient pas les collectivités. Ce sont les collectivités qui conçoivent ces politiques. Je travaille en collaboration avec l'Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT), l'Association nationale des élus de la montagne (ANEM), l'Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), l'Association nationale des élus du littoral (ANEL), l'Association nationale des maires des communes thermales (ANMCT) et la fédération des entreprises publiques locales. Je reconnais la qualité de l'expertise de ces différents acteurs et la chance qui est la mienne de pouvoir bénéficier de tels relais, pour faire remonter les problèmes et pour moderniser certaines de nos politiques publiques. Une telle démarche a été réalisée avec l'ANETT lors de la révision des critères de classement des communes touristiques il y a quelques mois.

D'autre part, j'ai annoncé en novembre dernier deux programmes relatifs au commerce dans les territoires. Le premier concerne la transformation environnementale des zones commerciales. Comment adaptons-nous ces zones conçues sur un modèle datant des années 60 et 70 ? Comment adaptons-nous ce modèle, parfois dépassé, aux nouvelles réalités et aux nouveaux enjeux du réchauffement climatique, de la mixité d'usage, mais aussi du « zéro artificialisation nette » ? Le second programme concerne la reconquête du commerce rural, car nous ne pouvons évidemment pas nous satisfaire de la situation actuelle, malgré les progrès et les investissements réalisés au cours du précédent quinquennat. Une commune sur deux n'a plus de commerce et cette situation n'est pas satisfaisante.

L'un des problèmes majeurs auxquels je suis confronté au quotidien est celui du non-recours aux aides existantes. Nous pouvons concevoir des politiques publiques les plus efficaces, les plus intelligentes et les plus pertinentes possible à Bercy, elles resteront parfaitement inopérantes si nous n'avons pas les bons relais pour les faire connaître.

Nous sommes également confrontés à cette problématique sur le sujet des aides aux énergies et plus largement concernant les aides et les dispositifs d'accompagnement sur la transition écologique. Ce sujet concerne aussi les territoires isolés, pour lesquelles nous ne manquons pas d'idées ou de réalisations. En revanche, nous manquons de relais pour parvenir à amener ces projets au plus près des territoires. Nos projets seront mieux connus de nos concitoyens, en associant les associations d'élus, les élus directement et les parlementaires sur la méthode.

Je ne dérogerai pas à la mission que je me suis donnée : être la ministre de la proximité. Nous avons encore beaucoup de travail.

Mon acception de la décentralisation est particulièrement pragmatique. Étant ministre de l'Économie de proximité, je travaille quotidiennement avec les collectivités. Le principe de réalité est au cœur de mon action. Nous avons, en matière de tourisme et de politique économique et commerciale, des échanges hebdomadaires avec les élus des territoires et les associations d'élus. Je ne me retranche jamais derrière l'entièreté ou non d'une compétence départementale ou régionale, sans essayer d'apporter des solutions. J'applique à mes relations avec les collectivités la même méthode qu'avec les autres secteurs. Seule l'efficacité m'importe. Je m'approche donc à chaque fois de l'échelon correspondant au projet que nous développons.

Je rappelle que le projet « Action cœur de ville » a été lancé en mars 2018. Il s'agit d'une politique de soutien au développement et à l'attractivité de 234 villes moyennes, de métropole et d'outre-mer. Cette politique s'appuie sur des investissements d'État et de trois partenaires financiers : la Banque des territoires, Action logement et l'Agence nationale de l'habitat (ANAH).

Au 1er novembre 2022, nous avons engagé 5,2 milliards d'euros, soit légèrement plus que la programmation initiale 2018-2022 qui prévoyait 5 milliards d'euros. Plus de 6 400 projets ont été lancés avec pour objectif de replacer les habitants, les commerces, les services et les activités dans les villes moyennes. Il s'agit également de stopper l'étalement urbain et de mieux réguler la périphérie commerciale. Cela s'est traduit par 78 000 logements rénovés, un peu plus de 1 000 cellules commerciales restructurées et de nombreux espaces équipements publics requalifiés. Le développement économique et commercial occupe une place prépondérante dans le programme. En effet, près de 20 % des projets engagés relèvent directement du champ du développement économique et commercial.

Le programme Action cœur de ville s'accompagne également d'autres dispositifs tels que Petite ville de demain, ou encore des mesures du plan de relance, notamment le fonds de restructuration des locaux commerciaux avec la requalification de 700 cellules commerciales.

Pour la période 2023-2026, un nouveau programme Action cœur de ville a été annoncé par Christophe Béchu et Dominique Faure, avec une enveloppe équivalente de 5 milliards d'euros. Nous réalisons actuellement un audit pour définir les politiques les plus utiles, en tirant aussi les leçons de cette première expérience. Le nouveau programme Action cœur de ville concernera plus particulièrement les entrées de ville et les quartiers de gare. Ces espaces sont fondamentaux pour les habitants et structurants pour les territoires. Jusqu'à présent, l'effort a surtout porté sur le cœur des villes ; nous devons désormais nous concentrer sur les bassins de vie, avec comme fil conducteur les enjeux environnementaux et la transition écologique dans les villes.

Une désertification commerciale importante est constatée dans de nombreuses communes rurales. Ce déclin du commerce conduit à des difficultés d'accès aux services de la vie courante, dans des zones peu denses. Le trajet routier médian pour se rendre au pôle commercial le plus proche est de 10 minutes, contre 2,6 minutes dans les zones denses. Je connais l'importance des commerces pour « irriguer » la totalité du territoire, et l'attente des consommateurs à ce sujet. Un nouveau commerce, dans une commune qui n'en a plus, doit, pour fonctionner, être multiservice. Le commerce itinérant rencontre un intérêt toujours plus grand, surtout dans les très petites communes. Nous devons soutenir ces tendances fortes. J'ai donc lancé une politique publique de reconquête du commerce rural qui permettra d'aider les communes à recréer des commerces, en soutenant leurs investissements. Une première enveloppe de 12 millions d'euros pour 2023 et d'ores et déjà prévue pour financer les premiers projets qui remonteront par les préfets dès le mois de mars. Les projets seront sélectionnés au fil de l'eau, selon un cahier des charges en cours d'élaboration avec le ministère de l'Écologie, mais aussi l'Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT), et évidemment les associations d'élus et les acteurs les territoires. Ces actions permettront d'apporter une aide d'environ 75 000 euros pour les commerçants avec une implantation physique et de 20 000 euros pour les autres. Notre objectif est d'atteindre, avec cette enveloppe, 1 000 collectivités accompagnées en 2023.

La méthode, en tenant compte de la spécificité propre à chaque territoire, est de sélectionner sur la base d'un cahier des charges, les projets proposés par les collectivités. Nous n'avons pas ici une dynamique d'appels à projets ou d'appel à manifestation d'intérêt. Les élus et les collectivités feront remonter leurs projets au préfet, et nous sélectionnerons, avec les différents acteurs, dont les associations d'élus, les projets les plus pertinents pour les territoires en 2023. Les projets financés doivent réellement correspondre aux besoins des territoires. Nous souhaitons un engagement fort des élus locaux pour détecter les bons projets et les faire remonter aux préfectures, afin de pouvoir activer rapidement les financements, tout en limitant les procédures administratives.

La transformation des zones commerciales est un autre sujet important pour 2023. Les zones commerciales concentrent encore 72 % des dépenses des Français dans le commerce physique. Plus de sept Français sur dix font donc encore leurs courses dans les zones commerciales. Ces zones resteront incontournables encore un certain temps, car elles sont fonctionnelles et répondent à un besoin. Pour nombre de nos compatriotes, la « ville du quart d'heure » se retrouve dans ces zones commerciales.

Or, ces zones ont prospéré sans réelle ligne directrice en matière d'urbanisme, d'architecture, de paysages et même de desserte. Ces zones de plusieurs dizaines, voire centaines d'hectares sont souvent totalement artificialisées et apparaissent à notre époque, pour certaines, comme des aberrations écologiques, qui ne répondent plus aux enjeux actuels de réchauffement climatique, de « zéro artificialisation nette » ou encore de regroupement de commerces de service. Il semble donc important de revoir cette sorte « d'impensé des politiques publiques », tant nationales que locales.

J'ai engagé, depuis novembre, un travail de préfiguration et de transformation de ces zones commerciales, en réunissant de grands acteurs de l'urbanisme, des experts en matière d'architecture, des foncières, des représentants des commerçants, des aménageurs, des élus et des associations d'élus. Je tiens à remercier les parlementaires qui ont participé au groupe de travail dédié pour réinventer ces espaces. Nous devons redéfinir les modèles en fonction du réel, car les situations sont différentes pour les zones dynamiques ou en grande friche, celles situées dans les grandes métropoles, dans des villes moyennes ou aux abords d'une commune rurale.

Nous devons uniquement nous baser que sur les retours d'expérience d'acteurs qui ont déjà engagé ces réflexions sur leur propre territoire, comme les agglomérations de Nantes et de Strasbourg.

Sur cette base, et à compter du mois d'avril, nous engagerons la sélection d'une dizaine d'expérimentations pour lancer, avec les collectivités territoriales, la transformation concrète de ces espaces. J'ai demandé et obtenu pour cette dizaine d'expérimentations sur la revitalisation des friches commerciales, un financement d'une enveloppe de 24 millions d'euros pour la seule année 2023.

Je veillerai également à ce que tous les outils juridiques puissent être mobilisés pour accélérer, faciliter et sécuriser la transformation de ces zones. Un important travail normatif doit être réalisé pour simplifier la transformation de ces espaces.

Le second volet d'Action cœur de ville s'étendra aussi aux entrées de ville. Notre travail servira donc également au déploiement du programme en entrée de ville ou proche des gares.

Je souhaite désormais évoquer le sujet des aides énergie et l'accompagnement au cas par cas des entreprises. La situation de nos artisans boulangers est plus complexe que celle d'autres acteurs de l'artisanat. Notre approche se concentre sur les TPE et les PME. Le critère retenu est celui des dépenses énergétiques lorsqu'elles représentent plus de 3 % du chiffre d'affaires. Ce critère n'intervient qu'après l'amortisseur électricité qui est ouvert à l'ensemble des TPE et des PME.

Le dispositif mis en place représente 12 milliards d'euros, soit un quart du budget de nos armées et un montant plus élevé que le budget du ministère de la Justice. Ces 12 milliards d'euros sont issus de la taxation de la rente infra-marginale et viennent financer le plafonnement du prix de l'électricité à 280 euros le mégawattheure en moyenne sur l'année 2023 pour les TPE, notamment celles qui ont signé leur contrat d'approvisionnement lorsque le prix était au plus haut.

Ces 12 milliards d'euros financent également l'amortisseur électricité pour les TPE et PME. Cet amortisseur représente une ristourne directe de 15 à 20 % sur la facture d'énergie du mois de janvier 2023. Ces entreprises ont également la possibilité de bénéficier du guichet d'aide entreprise. Le guichet se cumule à l'amortisseur. En outre, l'amortisseur et le guichet se cumulent au prix plafonné à 280 euros le mégawattheure.

Des outils existent pour soulager la trésorerie des entreprises. Je suis consciente que décaler une trésorerie et des charges ne fait que décaler un problème. Je sais également combien la trésorerie de nos artisans-commerçants est tendue, avec le problème de l'énergie et de l'envolée des prix des matières premières. Des artisans pourront donc bénéficier de délais de paiement ou de reports de charges.

Tous les services de l'État sont mobilisés, ainsi que l'ensemble des préfectures. Il existe, dans chaque département, un conseiller en charge de la sortie de crise, dont la mission est d'accompagner les artisans, les commerçants, les TPE et les PME qui rencontreraient des difficultés pour obtenir des aides ou éventuellement renégocier les contrats d'énergie. Nous menons ce travail au cas par cas pour les PME.

Tous ces éléments ont été rassemblés sur la page d'accueil du site des impôts. Les TPE peuvent également effectuer des simulations pour calculer les aides dont elles peuvent bénéficier avec l'amortisseur et le guichet. Nous travaillons à la mise en place d'un seul et unique simulateur. Le site présente aussi le tableau des conseillers départementaux à la sortie de crise de toute la France, avec les numéros de téléphone et les adresses électroniques de ces personnes.

Il est indispensable pour ces entreprises de cocher la case « TPE » ou « PME » sur l'attestation en ligne sur le site des impôts. Cette attestation permet aux fournisseurs d'appliquer la bonne réponse en fonction de la taille de l'entreprise. Tous les commerçants artisans reçoivent cette attestation, en double, dans leur espace en ligne, sur le site de leur fournisseur d'énergie. Cette attestation doit impérativement être envoyée aux fournisseurs, pour que ces derniers puissent appliquer le tarif de 280 euros le mégawattheure pour les TPE ou les aides amortisseurs et guichets pour les PME.

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