Notre scénario ne prévoit pas un échec dans le déploiement des énergies renouvelables, ou dans la maîtrise de la consommation, mais une planification, aussi raisonnable et maîtrisée que possible, de l'évolution de notre système électrique, qui permette de trouver des marges le plus rapidement possible.
Les chiffres que vous venez de donner illustrent la difficulté croissante que nous rencontrons, à mesure que nous prenons du retard dans la diversification de nos options, c'est-à-dire dans le déploiement des énergies renouvelables, dans la maîtrise de la consommation, y compris en matière de réduction de la pointe électrique, et dans la production des mécanismes de flexibilité et de stockage qui seront nécessaires au bon fonctionnement du système.
La situation est d'ores et déjà très contrainte. Vous avez raison de dire qu'un nouveau gouvernement qui voudrait appliquer le scénario négaWatt devrait fermer des réacteurs « dès que possible », mais cette possibilité devrait être analysée au regard des marges alors disponibles. Toutefois, ne pas fermer de réacteurs, et parier sur le prolongement de plus en plus de réacteurs de plus en plus longtemps, exposerait toujours davantage à des risques de défaillances du parc pour des raisons de sûreté, voire à la nécessité d'arbitrages impossibles entre des enjeux de sûreté nucléaire et de sécurité électrique.
La priorité devrait donc être, d'abord, de trouver des marges de manœuvre par le développement des énergies renouvelables et la maîtrise de la demande ; ensuite, de sécuriser la trajectoire de fermeture des réacteurs par la planification de son lissage et le cadre juridique de flexibilité précédemment évoqué, avant de s'engager sur de nouveaux moyens de production, qui, pour les plus massifs d'entre eux, n'arriveront que trop tard par rapport aux enjeux.
La PPE actuelle prévoit la fermeture de 12 réacteurs d'ici 2035. En supposant qu'ils soient les plus anciens du parc, les 44 réacteurs restants en 2035 atteindraient alors 49,5 ans de fonctionnement. La PPE engage donc déjà à prolonger à cinquante ans l'ensemble des réacteurs, mais aussi par anticipation à prolonger au-delà de cinquante ans une partie du parc, sauf à imaginer que le reste du parc pourrait fermer très rapidement après 2035. Repousser encore les échéances de fermeture des premiers réacteurs ne ferait qu'accroître ces difficultés.