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Intervention de Laurent Marcangeli

Réunion du jeudi 26 janvier 2023 à 9h35
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de l'administration pénitentiaire et de l'appareil judiciaire ayant conduit à l'assassinat d'un détenu le 2 mars 2022 à la maison centrale d'arles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Marcangeli, rapporteur :

Nous avons appris au cours des différentes auditions qu'il y avait peut-être eu des failles dans la transmission des informations. Et si elles ont bien été transmises, un certain nombre de décisions concernant les conditions de détention de M. Franck Elong Abé à la maison centrale d'Arles – qui ne relevaient pas de votre responsabilité – n'ont pas tenu compte de ce que vous venez de nous dire. Vous avez plus ou moins clos le débat en indiquant que les fonctions que vous exerciez alors ne vous permettaient pas d'intervenir dans la gestion de la détention de M. Elong Abé et que vous n'aviez pas une connaissance fine des faits intervenus au cours de sa détention, mais je sollicite tout de même votre avis.

À son arrivée à la maison centrale d'Arles, M. Frank Elong Abé avait déjà un parcours carcéral assez chaotique.

Il avait été condamné pour un certain nombre de faits de petite délinquance. Il s'était ensuite radicalisé. Arrêté alors qu'il combattait en Afghanistan, il avait été remis à la France par les autorités américaines et pris en charge par la DGSI. Il avait ensuite été condamné à neuf ans de prison pour des faits de terrorisme commis à l'étranger, puis condamné pour des faits commis dans un établissement pénitentiaire – il avait agressé une infirmière qu'il avait prise en otage. Sa détention avait été émaillée de nombreux incidents. Il avait mis le feu à sa cellule à de nombreuses reprises. Lors de sa présentation à des juges durant l'instruction, il se cognait la tête contre les murs. Bref, il présentait un profil psychologique et psychiatrique assez lourd.

Lors de son transfert à la maison centrale d'Arles donc, le renseignement pénitentiaire sait déjà d'une manière assez précise que sa personnalité particulièrement troublée et agitée représente un danger potentiel, tant en matière de terrorisme que pour ses codétenus et pour les surveillants.

Comme l'a dit le président, ce qui nous paraît assez spécial dans cette affaire, c'est que Franck Elong Abé n'a jamais vu de QER de sa vie. C'est statistiquement rare : sur 500 détenus TIS, ils sont seulement 13 dans ce cas – et je ne sais pas si ces derniers présentent le même degré de dangerosité que M. Elong Abé.

Comme il était libérable à la fin de l'année 2023, l'ancienne directrice de la maison centrale d'Arles, Mme Puglierini, nous a dit qu'elle avait privilégié la préparation de la sortie de prison plutôt que des mesures de rétorsion. Il avait pourtant été l'auteur d'au moins quatre incidents pendant sa détention dans cette maison centrale, dont des menaces et agressions envers des codétenus et des surveillants, mais aussi des destructions de matériel. Et nous nous apercevons qu'il n'a pas fait l'objet d'une mise à l'isolement ou d'une sanction, mais qu'au contraire on lui a donné un emploi d'auxiliaire pour nettoyer les équipements sportifs.

Selon vous, et compte tenu du process auquel vous avez fait référence, Mme Puglierini avait-elle bien été informée de la lourdeur du dossier de M. Franck Elong Abé – du fait qu'il avait combattu en Afghanistan et qu'il était particulièrement radicalisé ? Elle sait qu'il n'a pas de projet de réinsertion, nous avons des documents qui le montrent. Mais sait-elle qu'il présente un tel niveau de menace du fait de son parcours ?

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