Un déficit budgétaire de 168,5 milliards d'euros, en hausse de 14,6 milliards par rapport à la loi de finances initiale : voilà, messieurs les ministres, le cap que vous fixez dans le projet de loi de finances rectificative que vous nous soumettez.
L'augmentation des dépenses du budget général est liée à des mesures en faveur du pouvoir d'achat qui, hélas ! ne rempliront pas leur rôle, mesures qui se caractérisent par de trop nombreuses disparités pour être acceptées par les Françaises et les Français. De fait, elles ne ciblent pas les salariés les plus modestes, ceux qui vivent du SMIC, qui sont à temps partiel, bref : ceux qui sont les plus pénalisés par l'inflation actuelle.
Vous nous avez habitués par le passé à prendre des décisions en laissant des trous dans la raquette ; je pense notamment au Ségur de la santé. Le projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat bat en brèche les équilibres déjà trop fragiles de notre République sociale.
Vous faites le choix des premiers de cordée contre les premiers de corvée.
Or, souvenez-vous du passé, les étincelles peuvent provoquer des flammèches qui embrasent toute une société !
Soyons vigilants et rappelons-nous ce qu'écrivait Stéphane Hessel dans son essai intitulé Indignez-vous ! : « Il nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers : pas cette société où l'on remet en cause les retraites, les acquis de la sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis, toutes choses que nous aurions refusé de cautionner, si nous avions été les véritables héritiers du Conseil national de la Résistance. »
Des mesures caractérisées par des disparités, disais-je, mais aussi des orientations budgétaires dont je crains qu'elles ne soient insincères – la sincérité est pourtant l'une des vertus que nous exigeons de la moindre collectivité. Vous pensez, d'une part, que les dépenses nouvelles seront en partie compensées par le dynamisme des recettes prévisionnelles et, d'autre part, que l'inflation sera de 5,5 % en 2022 alors qu'elle pourrait être en définitive bien supérieure.
D'autres solutions existent et elles auraient permis une autre redistribution des valeurs produites que celle que vous nous avez proposée.
Oui, je le redis, il nous faut aller chercher l'argent là où il est : dans le monde de la finance, des géants du numérique que sont les GAFA, des profiteurs de crise. De même, nous devrions être au rendez-vous de la lutte contre l'optimisation fiscale et la fraude fiscale.
Oui, il faudra bien, à un moment ou à un autre, prélever sur l'économie virtuelle pour redistribuer plus et mieux à ceux qui bossent et entreprennent vraiment, ceux qui méritent de ne pas avoir à choisir entre remplir le frigo et se chauffer.
Oui, nous devons être aux côtés de nos collectivités, qui sont le premier maillon de la solidarité nationale, les communes et les départements ruraux notamment, qui, à chaque nouvelle crise, sont les premiers touchés. Ils forment la République des territoires, cette république que nous n'avons pas le droit de laisser choir !
« La France n'a rien perdu de son énergie. Elle est là, qui bat dans le cœur de celles et ceux qui font vivre nos territoires. » Ces mots sont ceux d'Emmanuel Macron. Alors, monsieur le ministre de l'économie, faites les bons choix avant qu'il ne soit trop tard !