Selon le tout récent rapport du programme européen d'observation de la Terre, Copernicus, les huit dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées dans le monde. L'année 2022 a été plus chaude d'environ 1,2 degré que pendant la période 1850-1900, avant que la révolution industrielle produise ses effets sur le climat. En Europe, elle a été la deuxième année la plus chaude. Les concentrations de dioxyde de carbone relevées dans l'atmosphère ont également atteint un niveau record.
« Qui aurait imaginé […] la crise climatique aux effets spectaculaires encore cet été dans notre pays ? » demandait benoîtement Emmanuel Macron lors de ses vœux le 31 décembre dernier. Qui ? Les compagnies pétrolières, depuis les années 1960, et à peu près tous les scientifiques qui travaillent sur le sujet depuis les années 1980-1990. Mais au vu du bilan de son précédent mandat, marqué par une flagrante et criminelle inaction climatique, de telles inanités ne sont guère surprenantes de la part du président des ultrariches et des ultrapollueurs. Rappelons qu'en novembre 2020 et octobre 2021, la justice a condamné l'État français pour manquement à ses engagements de lutte contre le dérèglement climatique. Rappelons également que seules 16 mesures très libéralement inspirées des 149 initialement proposées par la Convention citoyenne pour le climat ont été incluses dans la loi « climat et résilience » de 2021. Un an après son adoption, à peine 10 % des dispositifs législatifs ont été suivis par la publication des décrets d'application.
La présente proposition de loi constitutionnelle de nos collègues du groupe Socialistes et apparentés est donc éminemment opportune. Elle s'inspire d'une proposition de la fameuse Convention citoyenne qui défendait la création d'un Défenseur de l'environnement afin de renforcer l'efficacité des voies de recours des citoyens et des citoyennes pour agir contre des atteintes à l'environnement et pour améliorer la transparence et la précision des rapports d'évaluation a priori des lois dans le domaine environnemental. Le rapport Muschotti, commandé par le Premier ministre Castex, concluait également, en juillet 2021, à l'utilité d'une telle nouvelle instance.
Le Défenseur de l'environnement disposerait ainsi, sur le modèle de la Défenseure des droits, d'un statut d'autorité administrative indépendante (AAI) qui lui permettrait d'assurer l'effectivité de l'application des normes environnementales. Cette autorité pourrait à la fois s'autosaisir ou être saisie par n'importe quelle personne. Elle rendrait des avis publics sur les projets et propositions de loi et les évaluations qui les accompagnent avant examen du Parlement. Elle aurait la possibilité d'être assistée par un collège pour l'exercice de certaines de ses attributions afin de favoriser la participation citoyenne. Elle disposerait d'un pouvoir de sanction délimité par loi organique. Enfin, sa création devrait simplifier le paysage institutionnel en fusionnant des organismes existants.
Nous sommes favorables à cette proposition, que nous souhaitons par ailleurs inclure dans une stratégie plus globale. Notre défi en tant que société est d'inscrire l'activité humaine dans le cadre des limites planétaires. Pour y répondre avec responsabilité et détermination, nous devons procéder à une bifurcation écologique. Il s'agit de changer la façon dont nous produisons, consommons et échangeons pour nous mettre en harmonie avec la nature, tout en garantissant des conditions de vie dignes à chacun. Cela doit être planifié.
La planification est d'abord une méthode, la règle directrice et le principe qui en oriente le contenu. Nous l'appelons la « règle verte ». Concrètement, cela signifie l'obligation, à l'échelle de la France, de ne pas prélever sur la nature plus de ressources renouvelables que ce qu'elle peut reconstituer ni de produire plus de pollution et de déchets que ce qu'elle peut supporter. C'est le sens des amendements d'appel que nous avons déposés concernant la règle verte et le principe de non-régression, la planification, les biens communs et le référendum sur les accords de libre-échange.
Nous voterons avec enthousiasme pour ce texte.