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Intervention de Pierre Moscovici

Réunion du mercredi 25 janvier 2023 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques :

Je vais débuter ma réponse en évoquant la réforme des retraites de manière générale. Nous estimons qu'il existe un besoin de financement, qui peut être comblé par une réforme des retraites, laquelle peut toutefois prendre plusieurs voies. Ce n'est pas à moi de choisir. Néanmoins, il est clair qu'il ne s'agit pas là de payer le déficit de l'État : c'est une réforme faite pour équilibrer le système de retraite, pas pour autre chose. À partir de constat, nous arrivons à toute une série de questions que vous avez posées.

D'abord, le coût de l'inaction : il ne revient pas au Haut Conseil de se prononcer sur des choix politiques. Si la Cour des comptes a conclu sur la nécessité d'une réforme, nous n'avons pas à en prescrire les voies et les moyens.

La réforme des retraites assure-t-elle l'équilibre du régime de retraite par répartition à moyen et long termes ? Je ne peux qu'en juger au regard des mesures exposées et nous n'avons pas de certitude pour pouvoir le certifier, puisque notre information est lacunaire. Nous ne pouvons donc pas juger de l'incidence à moyen et long termes de cette réforme sur les finances publiques.

Pour répondre à la question de savoir si la réforme des retraites contribue à faire baisser la dette, là encore nous ne disons pas que cet effet n'existe pas, mais nous disons qu'il est plutôt inférieur aux prévisions antérieures. En revanche, sans réforme des retraites, la dette augmenterait d'ici à 2027.

S'agissant de la croissance potentielle, la réforme des retraites doit avoir un effet sur celle-ci, car elle influence un facteur de production : le travail. Si la quantité de travail augmente, la croissance potentielle également.

50 000 personnes vont devoir décaler leur départ à la retraite en 2023. Il s'agit d'un chiffre présenté dans les documents qui nous ont été soumis. Il y a bien 50 000 personnes qui devaient pouvoir partir en retraite à l'âge de 62 ans, sur les 200 000 personnes partant chaque année, qui devront décaler leur départ.

En ce qui concerne l'évaluation du déficit du système de retraite à 0,7 point de PIB en 2050, il ne s'agit pas du PIB d'aujourd'hui et si c'était le cas, ce chiffre serait plus important.

Où en est la charge de la dette compte tenu de la hausse des taux d'intérêt ? Pour l'État, celle-ci devrait augmenter d'un peu plus de 12 milliards d'euros en 2022, passant de 35 milliards d'euros à 47 milliards d'euros en comptabilité nationale. En 2023, le Gouvernement prévoit un reflux de la charge de la dette de 3 milliards d'euros, pour arriver à 44 milliards d'euros – reflux qui provient du repli de la charge des titres indexés en lien avec la baisse attendue de l'inflation –, mais nous ne savons pas quel sera l'effet de la hausse des taux. Compte tenu de cette incertitude et de l'inflation qui pourrait être plus élevée, ce recul de la charge de la dette n'est pas acquis.

Combien la hausse du minimum contributif coûte-t-elle ? Son coût est prévu à 0,4 milliard d'euros en 2023 par le Gouvernement. Il sera partiellement financé par une solidarité entre les branches des régimes obligatoires de base. Les contours exacts de la mesure restent à préciser.

S'agissant de la croissance et des effets sur le déficit, le scénario du Gouvernement est à un point, soit au-dessus du haut de la fourchette retenue par les prévisionnistes de référence. Nous aurions pu être plus sévères, mais nous sommes restés modérés, car nous n'écartons pas totalement la possibilité d'une bonne surprise. Néanmoins, il serait bon que le Gouvernement ajuste à un moment donné sa prévision de croissance, car s'il y avait 0,8 point de croissance en moins, cela représenterait 0,4 point de déficit en plus et donc 10 milliards d'euros d'endettement supplémentaires.

Enfin, au sujet du projet de loi de programmation de finances publiques, je ne me permettrais pas de contredire ceux qui l'ont critiqué sur le fond. Néanmoins, nous avons besoin d'une référence commune : la loi organique et les traités l'exigent. On peut toujours bricoler, mais il existe des règles et la Commission européenne les rappellera à un moment donné. Du point de vue français, le programme de stabilité n'est pas non plus équivalent à la loi de programmation. La loi organique dit d'ailleurs bien que nous devons nous prononcer par rapport à un objectif de moyen terme qui figure dans la loi de programmation de finances publiques. Il s'agit donc d'un problème juridique et constitutionnel. Je le redis : nous ne pourrons pas faire sans une loi de programmation de finances publiques.

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