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Intervention de Dominique Maillard

Réunion du jeudi 26 janvier 2023 à 9h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Dominique Maillard :

La France a été pendant 40 ans exportatrice d'électricité, ce qui aurait été impossible en l'absence de capacités excédentaires par rapport à la demande interne. En effet, les prévisions qui ont appuyé le premier programme nucléaire ont été réalisées dans les années 1970 et tablaient sur la perpétuation d'une croissance économique de l'ordre de 6 %. Puisqu'il existe une forte corrélation entre la consommation d'électricité et la croissance du PIB, nous avions dimensionné le premier parc nucléaire sur une hypothèse de croissance de 5 à 6 % de la consommation d'électricité. Or, la production a continué de croître à un rythme moyen de 3 %. Le parc était par conséquent calibré à une évolution de la demande qui ne s'est pas concrétisée. Cette électricité excédentaire par rapport aux seuls besoins nationaux a toutefois pu être écoulée sur le marché européen et ainsi donner lieu à une profitabilité de ces investissements sur celui-ci, à défaut d'être assurée sur le marché intérieur.

Cette surcapacité a indéniablement conduit au développement de nouveaux usages de l'électricité. EDF a engagé des recherches sur le développement du chauffage électrique qui n'ont d'ailleurs pas toujours été encouragées par les pouvoirs publics. Des débats houleux sur le thème du chauffage électrique et sur son manque d'efficacité se sont déroulés de 1974 à 1980. Il est vrai que pour produire un kilowattheure électrique, il est nécessaire de consommer trois kilowattheures thermiques, soit un rendement total de l'ordre de 30 %, contre 80 % pour le fioul. Ramené à l'énergie primaire, le chauffage électrique génère un rendement discutable. Le véhicule électrique n'était alors pas considéré comme une filière, du fait des capacités de stockages, qui étaient perçues comme l'obstacle principal. Les axes de développement commercial d'EDF incluaient par conséquent le chauffage électrique et le développement des usages de l'électricité dans l'industrie.

Le développement du chauffage électrique en France, qui est sans équivalent dans les autres pays européens, a généré une très forte sensibilité du système électrique français à la température. Un degré de moins en période hivernale correspond à une demande de 2 400 mégawatts supplémentaires de demande. Le développement électrique en France a indubitablement induit un fort gradient thermique et, par extension, une forte sensibilité à la température qui n'existent pas dans les pays voisins. En effet, les systèmes de chauffage de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne, et même de l'Italie reposent sur les énergies fossiles. Lorsque l'Europe subit une vague de froid, la demande électrique est élevée en France, mais augmente beaucoup moins dans les pays voisins, ce qui nous permet d'importer.

En conclusion, je ne suis pas convaincu que le bilan soit si négatif.

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