Le constat que je viens de rappeler est dramatique : il s'agit d'un fléau pour la société. Nous ne devons pas faiblir ; nous devons, bien au contraire, amplifier nos efforts. Loin de considérer que l'essentiel a été fait, faisons taire ceux et celles qui pourraient penser que la cause des femmes est entendue et que le problème est réglé ; ce n'est nullement le cas.
Le Comité national de l'ordonnance de protection (Cnop), créé par la Chancellerie en 2020 à la suite de l'adoption de la proposition de loi très innovante de 2019, a mis en évidence, dans une étude réalisée par des magistrats, que l'ordonnance de protection n'était pas délivrée aussi facilement qu'elle devrait l'être. Cela tient au fait que cette délivrance est encadrée par deux critères : la vraisemblance de violences et la vraisemblance d'un danger, établies à l'issue d'un débat contradictoire. C'est parce qu'ils achoppent sur la notion de danger que les magistrats hésitent à délivrer l'ordonnance de protection.
Dès lors, il importe de modifier l'article 515-11 du code civil pour aider le juge dans sa décision, en considérant que le danger accompagne nécessairement les violences. C'est l'objet de l'article 1er . Comment peut-on imaginer qu'une femme fasse valoir devant le juge qu'elle a été victime de violences, que ces violences alléguées paraissent vraisemblables à l'issue d'un débat contradictoire et que le juge se détourne en refusant de délivrer l'ordonnance de protection, alors même que la requérante réclame cette protection ? Il y a là, nous le voyons bien, une fragilité.
Tel était l'enjeu, et nous avons eu une discussion très nourrie à ce sujet en amont. La Chancellerie a appelé notre attention sur un arrêt de la Cour de cassation qui laissait penser que la notion de danger était essentielle à la constitutionnalité de l'article 1er . Pour ma part, je considère que le critère des violences est le plus important. Les magistrats doivent être confortés dans l'idée qu'ils peuvent délivrer une ordonnance de protection dès lors que les violences alléguées lui paraissent vraisemblables à l'issue d'un débat contradictoire, car cela implique que le danger existe. Il n'y a pas de violence anodine, et il n'y a pas lieu de distinguer entre une violence plus grave qui commanderait la délivrance d'une ordonnance de protection et une autre forme de violence qui ne la commanderait pas.
L'article 2 vise à faciliter le travail du magistrat en lui donnant la possibilité de délivrer une ordonnance de protection pour une durée maximale de douze mois, contre six mois actuellement. Cela laissera au juge une plus grande latitude d'appréciation.
De manière générale, nous nous inscrivons dans un mouvement qui consiste à faire confiance au juge et à lui permettre de délivrer l'ordonnance de protection librement, sans excès de procédure, en prenant les mesures qui lui paraissent adaptées à la situation. Nous remercions bien évidemment les juges pour leur engagement et leur travail. L'important est désormais d'adopter le texte.