Madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, bien que nous ayons une excellente faculté de droit à Chambéry, ma question ne concerne pas votre portefeuille, puisqu'elle concerne la justice, mais je suis certaine que vous pourrez y répondre.
On peut faire un constat simple : depuis 2017, sous l'impulsion du garde des sceaux et celle du Gouvernement, ainsi que des gouvernements précédents, les moyens alloués à la justice n'ont cessé de croître. La loi de finances pour 2023 consacre, pour la troisième année consécutive, une augmentation de 8 % des moyens du ministère de la justice, qui s'élèvent désormais à 9,6 milliards, soit une hausse de plus de 40 % depuis 2017. Je me félicite de cette ambition nécessaire pour restaurer la justice de notre pays, garantir les droits et libertés de chacun et contribuer ainsi, je le crois, à apaiser notre société. Par ailleurs, suite aux états généraux de la justice lancés fin 2021, le garde des sceaux a dévoilé le 5 janvier dernier un plan d'action pour remédier aux lenteurs et à la complexité de la justice, plan accompagné de mesures budgétaires supplémentaires, démontrant ainsi sa volonté de produire un effort constant. Toutefois, sur le territoire national, dans différentes juridictions, les files d'attente s'allongent encore, l'impatience des justiciables est là et l'usure des professionnels, magistrats et greffiers notamment, est bien réelle.
Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement et du garde des sceaux sur la situation particulière de la cour d'appel de Chambéry, dont le ressort couvre les départements de Savoie et de Haute-Savoie, pour une population de plus de 1,2 million de personnes, avec treize juridictions réparties sur sept sites. Notre cour d'appel connaît une activité soutenue de plus de 52 000 décisions par an avec une tendance forte à la hausse du nombre de dossiers, du fait de l'attractivité de nos territoires et de leur situation géographique aux frontières de l'Italie et de la Suisse. Pourtant, alors que la France compte en moyenne 10,9 juges pour 100 000 habitants, sur le ressort de la cour d'appel de Chambéry, ce ratio est de seulement 5,75, ce qui constitue, indéniablement, un des points noirs de l'organisation territoriale française. Le stock des affaires civiles en Savoie se situe à des niveaux jamais atteints par le passé et les délais d'audiencement n'ont jamais été aussi longs.
Le manque d'outil fiable d'évaluation de la charge de travail, donc des besoins en nombre de juges dans les territoires, est une réalité qui conduit malheureusement à raisonner de manière théorique pour affecter les magistrats. Un travail pour réaliser ces affectations de manière plus pertinente est certes actuellement en test en Savoie, mais la situation critique imposerait que l'on agisse plus rapidement.
Madame la ministre, vous qui agissez, avec le garde de sceaux et le Gouvernement, avec force et responsabilité pour résoudre les problèmes structurels de notre système judiciaire, pourriez-vous me dire dans quelle mesure il serait possible de répondre dans des délais raisonnables au manque de moyens alloués à la justice en pays de Savoie ?