Depuis plus de deux ans, les Français subissent les conséquences d'une pandémie que nous ne pouvions pas prévoir, mais que nous aurions pu mieux gérer. Depuis les attentats du 13 novembre 2015, la France a vécu plus de la moitié du temps sous le régime de l'état d'urgence, antiterroriste puis sanitaire.
Sans remettre en cause la légitimité d'instaurer un régime d'exception en période de crise, nous devons tous convenir que, pour préserver les droits et les libertés individuelles mais aussi pour maintenir la confiance avec nos concitoyens, le recours à ces régimes d'exception doit être circonscrit dans le temps pour éviter qu'ils soient banalisés et intégrés au droit commun.
Or, ces principes semblent avoir été oubliés dans certains territoires. En Guyane, les mesures les plus strictes, restrictives et attentatoires aux libertés individuelles prévues par l'état d'urgence sanitaire ont été appliquées sans discontinuer jusqu'à sa levée définitive, en mars 2022. Deux ans ! Mon territoire a fait partie, avec d'autres outre-mer ou dans l'Hexagone, des principales victimes de la déliquescence du service public de la santé, que la crise sanitaire a mise en lumière. Les manquements dont souffre l'hôpital public et que son personnel dénonce depuis des années, notamment l'insuffisance des moyens financiers et humains, le manque de lits en réanimation ou le défaut de considération, ont aggravé la crise. Les nombreux atermoiements du Gouvernement, sur le port du masque ou les confinements entre autres, n'ont fait que ralentir la sortie de crise. Ainsi, le tribunal administratif de Paris a reconnu, le 28 juin dernier, la responsabilité fautive de l'État dans la gestion du stock de masques antérieurement à l'émergence de la covid-19 puis dans la communication gouvernementale initiale relative au port du masque pour la période antérieure à mai 2020.
Savez-vous seulement comment vont nos jeunes, nos étudiants, qui ont pris de plein fouet ces mesures radicales et ont souffert du confinement ? Aucune étude n'a été réalisée pour évaluer la santé mentale des Français, particulièrement des plus jeunes. Les familles françaises les plus précaires sont en détresse sociale. Dans le secteur économique, de nombreux professionnels se sont sentis lésés et se sont retrouvés en grande difficulté.
Les décisions prises pour lutter contre la pandémie négligent tout une dimension humaine. Posons-nous les bonnes questions, car les crises se succèdent sans que nous trouvions de solution durable.
Il est heureux que ce projet de loi ne tende à proroger ni le cadre juridique de l'état d'urgence sanitaire, ni celui de la sortie de crise sanitaire. Hélas, il ne résout pas le problème structurel des hôpitaux et les difficultés de notre système de santé face à de telles crises sanitaires. Il ne prévoit pas davantage de dresser le bilan de la gestion de cette crise, au regard du jugement rendu par le tribunal administratif de Paris. En revanche, il vise à prolonger le maintien des systèmes d'information de crise. Nous nous y opposerons, tout comme nous voterons contre la possibilité de demander un passe aux personnes qui se déplacent à destination ou en provenance de la Corse ou d'une collectivité ultramarine, car nous souhaitons que cette disposition soit réservée aux personnes entrant ou sortant du territoire national.
Ce texte n'est pas à la hauteur des enjeux, en particulier en outre-mer.