Je préconisais Atmea, à tort ou à raison, car j'accordais beaucoup d'importance à la sûreté. Comme vous le savez, les réacteurs de troisième génération étaient plus sûrs que leurs prédécesseurs de deuxième génération. Même avant Fukushima, je considérais la sûreté « importantissime ». Après Fukushima, nous n'avons plus parlé de N4. Je poussais donc pour Atmea.
Il existait aussi, sans doute, une question politique concernant les pays avec lesquels nous souhaitions travailler. À l'époque, la personne qui s'occupait de ces sujets chez EDF – Hervé Machenaud – avait beaucoup travaillé en Chine, s'entendait très bien avec les Chinois et nourrissait de grands espoirs que la France détienne une participation importante dans la construction des futurs réacteurs en Chine, à la suite des deux EPR déjà construits dans ce pays. Il défendait donc la construction de réacteurs N4. Pour ma part, en dépit de mon goût pour l'international, je n'y croyais pas trop, puisque je pensais que les Chinois seraient rapidement en mesure de construire seuls ces réacteurs. Le projet Atmea était quant à lui mené avec les Japonais, sachant que le Japon était, lorsque j'étais directrice des sciences de la matière, notre principal allié sur les sujets de fusion. Depuis, nous travaillons aussi beaucoup avec la Chine, pays aujourd'hui le plus avancé en matière de fusion et qui tirera tous les marrons du feu d'ITER. Avec le Japon, nous avons construit un instrument d'astronomie très important dans le désert d'Atacama au Chili, en coopération avec les Américains et les Européens. Je connais donc bien les Japonais en tant que collaborateurs : il s'agit d'interlocuteurs sérieux et loyaux.