Avant tout, j'adresse à chacun d'entre vous mes félicitations républicaines pour son élection et je félicite le président ainsi que les membres du bureau de la commission pour leur désignation.
Je souhaite également remercier le Président de la République et la Première ministre pour la confiance qu'ils m'ont témoignée en me remettant cette lourde responsabilité. Je salue la mobilisation remarquable de Mme la ministre Brigitte Bourguignon ces dernières semaines.
La santé est ce que nous avons de plus cher. Avec la ministre déléguée Agnès Firmin Le Bodo, je m'engage à mettre tout en œuvre pour que chacun puisse se soigner dans de bonnes conditions, quel que soit son revenu ou son lieu de résidence, et pour développer une culture de la santé permettant de bien mieux prévenir les difficultés de nos concitoyens.
Depuis plus de deux ans, nous faisons face à une pandémie qui a appelé des réponses exceptionnelles. Fantassin de la première ligne dans l'Est de la France, j'ai pu voir de très près, de trop près peut-être, la réactivité de notre système de santé, qui a été exceptionnelle, mais aussi les ravages de cette épidémie sur les malades, sur leur famille, mais également sur les soignants.
Nous sommes entrés dans le régime de l'état d'urgence sanitaire avec la loi du 23 mars 2020. Alors que nous ne disposions pas de l'arme vaccinale, il nous a permis d'adopter des mesures exceptionnelles, à la hauteur de l'épidémie de covid-19 à laquelle nous devions faire face.
Je vais encore une fois saluer la mobilisation extraordinaire des personnels soignants et médico-sociaux, des équipes du ministère de la santé et, plus généralement, de toutes les personnes ne relevant pas du secteur médical qui sont intervenues au service des Français depuis le début de la crise, parfois au péril de leur santé et de leur vie. J'ai ainsi une pensée pour les personnels de la SNCF, d'Aéroports de Paris et du transport aérien, notamment Air Austral et Air Caraïbes, qui ont permis des transferts massifs de patients pour soulager les régions les plus affectées, tant en métropole qu'outre-mer. Je pense aux victimes de la covid-19 et à leurs proches. Enfin, je remercie nos voisins européens pour leur solidarité, qui s'est matérialisée par une aide mutuelle. Je m'appliquerai à entretenir cet élan.
Je mesure ma responsabilité en matière de gestion de l'épidémie. Une boussole dirigera mon action : protéger les Françaises et les Français ainsi que notre système de santé, maintenir la prise en charge des autres soins, préserver un mode de vie aussi normal que possible – c'est-à-dire veiller, à chaque instant, à la stricte nécessité et proportionnalité des mesures prises, en toute transparence vis-à-vis de nos concitoyens et de leurs représentants.
Le cadre juridique de l'état d'urgence sanitaire et le régime dit de sortie de crise sanitaire s'éteindront le 31 juillet prochain, comme le Gouvernement s'y est engagé et conformément à votre vote. Le projet de loi qui vous est soumis n'est donc pas un projet d'état d'urgence – je tiens à ce que l'on ne fasse pas circuler de fausses informations. Ce projet de loi comporte des mesures minimales, mais nécessaires, pour continuer à surveiller l'épidémie après le 31 juillet, afin de protéger les Français.
Avant de présenter ces mesures, je souhaite vous informer plus précisément sur la circulation du virus de la covid-19 en fonction des dernières données dont je dispose.
Nous connaissons actuellement une septième vague de covid-19. Les sous-variants d'omicron BA.4 et BA.5 constituent désormais les souches virales majoritaires. Ils provoquent une résurgence épidémique sur l'ensemble du territoire national. Cette reprise s'observe dans l'ensemble de l'Europe.
S'agissant de l'incidence, le nombre de cas augmente ces derniers jours. Le nombre de contaminations quotidiennes était de 120 000 en moyenne cette semaine, et devrait légèrement dépasser les 200 000 ce soir.
L'ensemble du territoire est touché, mais c'est en Île-de-France que le taux d'incidence est le plus élevé, dépassant les 1 200 cas pour 100 000 habitants. Les situations sont contrastées outre-mer, où la cinétique de l'épidémie est différente de celle observée en métropole. J'aurai toujours une attention particulière pour ces territoires de la République. Si le taux d'incidence est, à l'heure actuelle, faible à La Réunion et à Mayotte, les données épidémiologiques se dégradent en Guadeloupe et en Guyane – mais selon une dynamique proche, voire moindre qu'en métropole. La Martinique fait, quant à elle, face à une résurgence épidémique marquée depuis plusieurs semaines. La situation y semble toutefois en voie d'amélioration, avec un taux d'incidence en baisse, mais qui reste élevé – de l'ordre de 1 100 cas pour 100 000 habitants. Je fais part de ma solidarité avec nos compatriotes ultramarins et je salue l'engagement des soignants sur place.
Sur le plan clinique, selon les données dont nous disposons, les deux sous-variants actuels présentent les mêmes caractéristiques que le variant omicron du début de l'année 2022 et de fin mars, à savoir une très forte transmissibilité mais un tableau clinique moins sévère que les souches historiques du virus.
Je ne peux pas dire avec certitude quand le pic épidémique sera atteint. Les scientifiques esquissent un horizon à deux ou trois semaines, mais avec beaucoup d'incertitudes. Les pays qui ont connu avant nous une circulation virale comparable, principalement le Portugal et l'Afrique du Sud, ont atteint leur pic en six semaines environ.
Bref, le virus circule plus et plus vite. Nous devons – et tel est mon devoir en tant que ministre – protéger la population et veiller au retentissement de cette reprise sur le système de santé.
À l'heure actuelle, nous observons une augmentation des admissions dans les services hospitaliers conventionnels et, dans une moindre mesure, dans les services de soins critiques : environ 7 000 patients sont actuellement hospitalisés dans les premiers et près de 1 000 dans les seconds. Cela reste très en deçà du pic de 3 500 patients en soins critiques atteint en janvier dernier, sans même parler des vagues précédentes, encore plus importantes.
Pour autant, je suis extrêmement attentif à l'évolution de la situation, compte tenu du contexte que nous connaissons à l'hôpital. Ce dernier va être renforcé à court terme par les mesures d'urgence que j'ai présentées à la demande de la ministre qui m'a précédé. Il faut désormais en organiser la mise en œuvre extrêmement rapide, conformément aux annonces de la Première ministre. La reconnaissance de la pénibilité, et en particulier des contraintes attachées au travail de nuit, fait partie de ces engagements.
Contrairement à ce que d'aucuns prétendent, la stratégie du Gouvernement pour limiter l'impact de cette nouvelle vague est claire.
Il faut prévenir la diffusion du virus. Nous vivons depuis plus de deux ans avec lui et nous savons quels sont les comportements à adopter. Je le dis aux Français avec solennité : il faut que nous retrouvions les bons réflexes. Nous pourrions légiférer sans cesse, mais nous souhaitons plutôt que chacun soit réactif et adapte son comportement aux exigences de la situation. Il faut mettre un masque dans les lieux bondés – comme cette salle. Il faut le mettre dans les transports en commun ou à l'occasion des départs en vacances.
Il faut mobiliser la vaccination, qui constitue l'arme décisive contre les formes graves du virus. Conformément aux recommandations des autorités scientifiques, un nouveau rappel est proposé aux personnes les plus fragiles, c'est-à-dire les plus de 60 ans et les personnes immunodéprimées. Il faut se faire vacciner quand on est fragile et il faut le faire maintenant, alors que nous n'avons pas atteint le pic épidémique – 50 % des contaminations surviennent lorsque l'épidémie ralentit. La vaccination est efficace contre les formes graves. Elle sauve des vies. Je le dis en tant que médecin urgentiste : j'ai vu bien trop de morts évitables. À l'heure actuelle, la vaccination connaît une accélération et je m'en réjouis. Nous avons enregistré près de 570 000 vaccinations la semaine dernière. Près de 3 millions de personnes ont ainsi reçu une deuxième dose de rappel. C'est mieux, mais ce n'est pas encore assez. La dynamique doit encore s'amplifier, avec l'appui des professionnels de ville, médecins et pharmaciens.
Il faut aussi adopter les bons comportements quand on est cas contact ou symptomatique, c'est-à-dire se tester, réduire ses contacts, et s'isoler si on est positif. À ce propos, je me félicite que notre système de test tienne. Plus de 3 millions de tests ont été effectués la semaine dernière. Le dispositif fonctionne. Les Français le mobilisent.
Il faut assurer la bonne prise en charge à ceux qui sont fragiles ou symptomatiques. Des traitements curatifs existent, comme le Paxlovid, qui réduisent très significativement les risques d'hospitalisation pour les personnes fragiles. Il est important que les Français le sachent, pour pouvoir en parler à leur médecin et leur pharmacien dès l'apparition des symptômes. La semaine dernière, 1 500 patients ont bénéficié de ce traitement, soit une progression de plus de 50 % par rapport à la semaine qui précédait. C'est l'une des solutions figurant dans l'arsenal destiné à protéger nos concitoyens les plus à risques.
Voilà pour la situation sanitaire. Si nous sortirons le 31 juillet des régimes législatifs exceptionnels de crise, nous ne sortirons pas pour autant de l'épidémie de covid-19. Nous avons donc besoin de maintenir certains outils de gestion, et tel est principalement l'objet du projet de loi qui vous est soumis. Il comporte deux articles très ciblés. Je souhaite qu'il soit approuvé par une majorité au sein de votre assemblée.
Le premier article vise à maintenir jusqu'au 31 mars 2023 – soit à l'issue de la phase épidémique hivernale – les systèmes d'information de crise que constituent en particulier le SI-DEP (système d'information national de dépistage populationnel pour le covid-19) et Contact Covid.
Le SI-DEP est une plateforme sécurisée permettant l'enregistrement des tests covid. Elle permet notamment de s'assurer que toutes les personnes positives sont bien prises en charge, mais aussi de créer de manière sécurisée les certificats permettant aux Français qui le souhaitent de se déplacer dans les nombreux pays qui maintiennent des restrictions à l'entrée de leur territoire.
Contact Covid permet, quant à lui, d'identifier les cas contacts et de vérifier que chacun d'entre eux est bien informé, testé et accompagné.
Je rappelle que ces outils numériques sont soumis au règlement général sur la protection des données (RGPD), que toutes les personnes qui y ont accès sont soumises au secret médical et qu'ils sont également placés sous la surveillance continue de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et du comité de contrôle et de liaison parlementaire institué par la loi du 11 mai 2020, lequel restera pleinement en fonction tant que ces systèmes d'information demeureront actifs. La gestion des informations stockées dans ces fichiers est clairement encadrée. Les données sont conservées six mois en cas de test positif et trois mois pour un test négatif.
Il est essentiel de conserver ces systèmes d'information. Ils sont le thermomètre de l'épidémie. Ils permettent d'informer les Français et les autorités sur le nombre de cas, et de consolider l'information sur la nature des variants. Ils garantissent la transparence de la gestion de l'épidémie. Ils sont des outils permettant d'anticiper et d'être réactif, notamment en ce qui concerne l'activation des réflexes barrière.
La Haute Autorité de santé (HAS) a établi différents scénarios d'évolution de la situation épidémique pour les mois à venir. Son scénario de base prévoit le maintien d'une circulation active du virus, avec la survenue de reprises épidémiques périodiques, ces vagues pouvant toutefois être progressivement de moindre impact. Cela implique que nous sachions mesurer précisément ces reprises épidémiques pour adapter nos réponses ou pour identifier le risque de survenue d'un scénario moins favorable.
Le second article du projet de loi vise à conserver jusqu'au 31 mars 2023 la possibilité de demander certains justificatifs aux personnes de plus de 12 ans souhaitant se déplacer à destination ou en provenance du territoire hexagonal, de la Corse ou de l'une des collectivités ultramarines. Il s'inscrit pleinement dans la stratégie adoptée au niveau européen, notamment pour rester en mesure de prévenir l'arrivée de nouveaux variants qui seraient préoccupants ou de préserver les territoires situés outre-mer, si c'était nécessaire. Je le crois proportionné à la situation, sur la base des avis du Conseil scientifique et du Conseil d'État.
Le projet de loi donne la possibilité d'intervenir, en veillant à l'information continue du Parlement et en cohérence avec la stratégie européenne.
J'entends ici ou là qu'il s'agit d'un retour au passe vaccinal. C'est faux. Nous devons la clarté à ceux qui nous écoutent : la faculté juridique d'imposer un passe vaccinal pour accéder à certains lieux publics de la vie courante s'éteindra le 31 juillet prochain, et l'article 2 du projet de loi ne permet pas de le remettre en œuvre.