La proposition de loi ne bouleverse pas les règles applicables aux élections sénatoriales : il s'agit d'un texte technique, qui répond au besoin exprimé par nos collègues sénateurs et par les grands électeurs de mettre ces règles en adéquation avec les spécificités du scrutin sénatorial, lequel se déroule en une seule journée, avec un corps électoral restreint. La réforme de 2019, en alignant le régime des élections sénatoriales sur celui des autres élections, n'avait pas pris en compte ces spécificités. La proposition de loi revient donc sur certaines de ses dispositions.
La première modification consiste à permettre aux candidats, dans les départements soumis au scrutin majoritaire, de faire campagne entre les deux tours le jour du scrutin. Cette modification relève du bon sens et il est heureux qu'elle soit proposée par nos collègues sénateurs. Il apparaît également logique que les frais de la campagne d'entre-deux-tours soient pris en charge par l'État, au même titre que ceux engagés dans d'autres élections.
La fin de l'embargo prévu par l'article L. 52-2 du code électoral est plus critiquable, car elle ne semble pas justifiée. Avant 2019, les remontées d'informations et la publication des résultats étaient progressives. La loi a donc institué, au même titre que pour les autres élections, un embargo jusqu'à la fermeture du dernier bureau de vote. L'interdiction de communication au public des résultats peut se justifier par la différence de mode d'élection – au scrutin majoritaire dans certains départements, à la proportionnelle dans d'autres – et la nécessité de préserver la sincérité du vote. L'argument selon lequel il faudrait renoncer à l'embargo au motif que certains résultats sont publiés avant l'heure de fermeture du dernier bureau de vote n'est pas propre aux élections sénatoriales. S'il fallait renoncer à l'embargo sous ce prétexte, il faudrait faire de même pour toutes les élections : des résultats ou des estimations sont publiés entre 18 heures et 20 heures dans les médias étrangers ou sur les réseaux sociaux, et nous sommes les premiers à les guetter le soir des élections.
Nous sommes donc favorables aux dispositions tendant à permettre d'organiser une campagne d'entre-deux-tours le jour de l'élection sénatoriale, mais sommes plus réservés s'agissant d'une dérogation à l'embargo – c'est le sens de l'amendement que j'ai déposé. Selon votre retour, monsieur le rapporteur, je pourrais le retirer. Il convient de différencier, d'une part, la proclamation des résultats dans le bureau de vote, dont l'objectif est d'informer les grands électeurs du nom des candidats encore en lice pour le second tour et de permettre le début de la campagne d'entre-deux tours, et, d'autre part, la publicité des résultats assurée par la presse et les réseaux sociaux auprès du grand public, qui serait susceptible d'influencer le vote des grands électeurs n'ayant pas encore voté, en particulier dans les départements où les sénateurs sont élus à la proportionnelle.