Je ne suis pas capable de répondre à cette question, puisque ces décisions ont été prises plusieurs années avant mon arrivée. Ce que je peux vous dire, pour éclairer l'histoire sans tomber dans l'anecdote, c'est que, lors de la réunion collective organisée à mon retour d'Asie au cours de laquelle j'ai pris connaissance de ce que l'État me demandait de faire à la tête d'EDF, la question de la mauvaise santé d'Areva a évidemment été abordée : il allait falloir trouver une solution pour remettre les choses d'équerre.
Nous étions alors en octobre-novembre 2014. Cette solution a été préparée de concert par la nouvelle présidence d'Areva et la nouvelle présidence d'EDF, sous l'autorité du Gouvernement. Si je ne m'abuse, elle a fait l'objet, le 3 juin 2015, d'un communiqué de presse de l'Élysée, qui expliquait l'évolution à venir. Ensuite, il s'est agi de bien exécuter cette décision stratégique. Sans trop entrer dans les détails, celle-ci a consisté à donner à EDF le rôle d'unique chef de file de la construction de réacteurs nucléaires, à faire de Framatome le responsable de la chaudière et d'un grand nombre des équipements qui sont installés dans celle-ci – Framatome reprenant les activités d'Areva NP et retrouvant le nom qui était le sien des années 1960 aux années 1990 – et à faire d'Orano ce qu'avait été la Cogema (Compagnie générale des matières nucléaires) pendant une trentaine d'années.
À l'époque, j'ai fortement soutenu cette décision de principe. Jusqu'au 23 novembre dernier, j'avais plutôt plaisir à constater que, d'une part, Framatome enregistrait de bons résultats opérationnels, avait renoué avec le profit, la croissance et l'attractivité pour les ingénieurs et les salariés en général, et avait reconstitué un bloc industriel en élargissant un peu ses compétences et en ne s'interdisant pas de procéder à des acquisitions, et que, d'autre part, Orano conduisait avec efficacité les contrats qu'EDF lui avait confiés.
Fin 2014, la restructuration de la filière était devenue très urgente. Je pense que la restructuration arrêtée dans son principe en juin 2015 et exécutée jusqu'à fin 2017 – il y a eu beaucoup de retard à cause de la dimension finlandaise du dossier – a été une bonne décision de politique industrielle, dont nous bénéficions aujourd'hui.