Je ne peux pas vous répondre de façon précise, mais nous vous ferons parvenir les statistiques. Je ne pense pas avoir brossé un portrait flatteur de Franck Elong Abé. Une maison centrale accueille des profils très lourds. À Arles, 55 % des détenus ont tué quelqu'un. Diriger un établissement pénitentiaire est un équilibre très précaire. À un moment, les détenus vont sortir ; nous devons préparer cette sortie, non pour leur faire un cadeau, mais pour éviter une récidive.
Autant le parcours d'Yvan Colonna est celui d'un détenu satisfaisant, autant celui de Franck Elong Abé est chaotique, perturbé. Mais par rapport à d'autres détenus, Franck Elong Abé a commis assez peu d'actes hétéro-agressifs. Il y a eu une tentative de prise d'otages requalifiée en violences volontaires, dans un contexte psychiatrique très lourd. Je ne dis pas qu'il faut banaliser ce qui s'est passé en 2021, mais un coup de tête asséné à un autre détenu est une chose qui arrive hélas assez fréquemment en détention. Les autres incidents sont plutôt des refus d'obtempérer, ou des tentatives de mise à feu de cellule. Ce détenu n'est pas un violent compulsif.
Parmi les détenus classés DPS, nous en avons un certain nombre qui ont connu des faits de violence. Il me semble que Franck Elong Abé a été vu vingt fois en commission pluridisciplinaire unique. Il a été examiné à dix reprises pour des affaires de classement, et certains classements jugés trop audacieux, notamment à l'atelier, ont été refusés. J'ai connu des moments d'extrême violence. Dans nos métiers, nous vivons avec ce poids. Nous ne prenons pas ces décisions à la légère, mais il faut les prendre ; personne ne le fera à votre place.