Nous poursuivons notre cycle d'auditions consacrées au retour d'expérience de la guerre en Ukraine, qui nous ont déjà permis d'appréhender les conséquences du conflit sur l'Union européenne et sur l'Otan, d'analyser les enjeux de dissuasion nucléaire et de mieux comprendre la place du renseignement d'origine sources ouvertes (Osint) dans cette guerre.
La diversité des intervenants et des thèmes abordés montre combien cette guerre intégrale, qui mobilise les champs aussi bien cinétiques qu'immatériels, est riche d'enseignements pour nos armées et, plus largement, pour la nation. C'est précisément pour nous éclairer sur les leçons opérationnelles du conflit ukrainien que nous accueillons ce matin cinq officiers responsables à différents titres de la doctrine et du retour d'expérience de nos armées : le général de division aérienne Vincent Breton, directeur du centre interarmées de concepts, doctrines et expérimentations, organisme de l'état-major des armées chargé de la pensée militaire opérationnelle ; le colonel Frédéric Jordan, secrétaire général du centre de doctrine et d'enseignement du commandement de l'armée de terre ; le capitaine de vaisseau Guillaume Desgrées du Loû, chef du bureau des opérations aéronavales ; et, pour l'armée de l'air et de l'espace, le colonel Romain Desjars de Keranrouë, de la cellule stratégie politique de l'état-major.
Messieurs, le maréchal Foch avait coutume de dire que la doctrine militaire est par nature évolutive, en ce qu'elle doit être constituée de « principes fixes, à appliquer de façon variable, suivant les circonstances, à chaque cas qui est toujours particulier ». La guerre en Ukraine constitue-t-elle un changement de circonstances, qui commanderait d'infléchir les principes de notre doctrine, c'est-à-dire la façon dont nous appréhendons et conduisons la guerre ? Au-delà de votre analyse du conflit, quelles leçons opérationnelles en tirez-vous pour nos armées, qu'il s'agisse de leurs capacités ou des conditions d'engagement et d'emploi des forces sur le terrain ? Alors que les forces morales et la résilience de la nation sont au cœur de la résistance ukrainienne, comment intégrer ces dimensions inhérentes à la défense globale au sein de la doctrine militaire ?