L'accès aux soins est un sujet crucial. Pourtant, force est de constater que c'est uniquement au pied du mur que des réformes sont envisagées. Coupes budgétaires, rentabilisation, industrialisation des actes, marchandisation des soins et insuffisance de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) ont été, au fond, les seuls axes des politiques publiques menées ces dernières années.
Les conditions de travail des personnels de santé se sont dégradées. Résultat : des métiers peu attractifs, beaucoup de reconversions et, pour celles et ceux qui restent, l'épuisement et le sentiment d'impuissance.
Au-delà du périmètre des compétences, l'amélioration des conditions de travail devrait être une priorité pour le Gouvernement, car les conséquences de leur détérioration pour les patientes et les patients sont aujourd'hui terribles. Notre système de santé est au bord du gouffre, peut-être même est-il déjà tombé dedans. Pour éviter la catastrophe, la valorisation des métiers du soin et la revalorisation des professionnels doivent être une priorité. En ce sens, l'ambition affichée par la proposition de loi est juste.
Toutefois, en commission, nous avons émis des réserves, non pas sur le fond du texte, mais sur les conditions d'exercice des nouvelles missions proposées. En effet, en permettant l'accès direct aux IPA, masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes dans le cadre de structures d'exercice coordonné, le texte élargit leurs responsabilités. La question de la primo-prescription par les IPA est également posée. Si nous saluons la montée en responsabilité de ces professionnels, qui tend à reconnaître leurs qualifications, nous sommes surpris que ces propositions ne soient pas accompagnées de la promesse d'une importante revalorisation salariale.
Autre source d'interrogations : de nombreuses mesures formant pourtant le corps de la proposition de loi seront définies par décret, nous laissant dans l'incertitude. C'est le cas, par exemple, des prérogatives des IPA spécialisés et des IPA praticiens, ou des compétences des assistants en médecine bucco-dentaire. Vous nous demandez ici de vous accorder une confiance quasi aveugle.
Bien que nous n'ayons pas obtenu toutes les victoires attendues, nos échanges en commission ont permis d'aboutir à un texte allant vers une meilleure reconnaissance du métier d'infirmier – occupé à 87 % par des femmes – et, plus globalement, de l'importance des professionnels paramédicaux, ainsi qu'une légère libération de temps médical pour certains médecins généralistes, par délégation de tâches. Par ailleurs, en parallèle de nos échanges en commission, différents groupements de professionnels nous ont fait part cette semaine de leur approbation du texte. Aussi, malgré nos réserves, nous reconnaissons que celui-ci entérine une amélioration et permet déjà, en l'état, des avancées importantes.
Nous proposons donc de l'adopter, tout en restant vigilants sur le fait que les nouvelles responsabilités données aux IPA, masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes doivent, par ricochet, conduire à une augmentation de leurs salaires et à une meilleure reconnaissance de leur rôle essentiel. Nous continuerons à être attentifs à la coordination entre paramédicaux et médecins généralistes, dont les métiers sont complémentaires, et resterons mobilisés pour lutter contre la désertification médicale. Nous nous risquons à un vote de confiance ; s'il vous plaît, ne nous décevez pas !