À travers l'ensemble du continent européen, la presse et les médias subissent des transformations majeures. Le monde des médias et de la presse est victime d'une révolution numérique et d'une crise de surinformation, les sources devenant de plus en plus difficiles à vérifier. Les usages de la population se transforment : les réseaux sociaux prennent le dessus. Les conséquences de cette évolution brutale sont difficiles à déterminer mais les menaces sont bien là.
Les nouveaux logiciels espions, tel Pegasus, menacent les citoyens et leurs représentants ; l'apparition d'algorithmes permettant de trafiquer les flux d'informations accélère et facilite les ingérences étrangères. Le nombre de scandales relatifs aux fausses informations a considérablement augmenté ces dernières années. Les récentes élections, notamment américaines, ont ravivé les débats sur les déstabilisations orchestrées par des puissances étrangères, qui déchirent le tissu social de nos sociétés. Les médias sont de plus en plus tributaires des aides gouvernementales ou sont dépendants de montages financiers permettant aux hommes proches de certains chefs d'État d'acquérir un quasi-monopole sur l'ensemble des grands médias nationaux.
L'évolution de la technologie dans un contexte géopolitique incertain nécessite donc des actions à la hauteur, autant sur les filières technologiques et industrielles à l'échelle européenne qu'en matière de législation nationale. Cela est d'autant plus important au vu des menaces qui pèsent régulièrement sur le travail des journalistes.
L'application d'un règlement uniforme pour l'ensemble des pays européens ne doit pas nous dispenser d'un débat nécessaire sur la situation des médias dans notre propre pays, compte tenu notamment des implications de la proposition de la Commission pour notre droit interne.
D'abord, sur la division entre les règles applicables aux médias audiovisuels et la presse écrite, la proposition de règlement crée un Comité européen pour les services de médias, censé regrouper l'ensemble des régulateurs nationaux. Or nos régulateurs sont différents pour la presse écrite et les médias audiovisuels. Cette différence n'est pas prise en compte dans le texte de la Commission.
Ensuite, s'agissant de la responsabilité éditoriale, l'adaptation du droit français à cette législation impliquerait de réécrire en grande partie la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Vous conviendrez, chers collègues, que l'enjeu est de taille. La Commission n'aurait-elle pas mieux fait de proposer un instrument différent ? Cette proposition de résolution nous conduit à nous interroger sur le choix d'un règlement uniforme plutôt que d'une directive qui aurait permis une plus grande liberté et du temps supplémentaire pour transposer la législation européenne dans le droit français. Ce délai supplémentaire nous aurait permis de débattre sur les conséquences des évolutions technologiques et du développement des plateformes en ligne, sur le marché médiatique et la liberté de la presse en France.
Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons et apparentés soutient cette proposition de résolution européenne.