Nous sommes appelés à nous exprimer sur un sujet fondamental pour toute démocratie : la liberté des médias. Cet enjeu intéresse l'ensemble des pays membres de l'Union européenne – pour certains, il est vrai, d'une façon cruciale. Le projet de règlement sur la liberté des médias de la Commission européenne répond bien à une nécessité : la garantie du droit des peuples à une information pluraliste et de qualité. Mais, franchement, cette proposition de résolution européenne ressemble à une vaste occasion manquée.
Occasion manquée pour nous, députés du pays des droits de l'homme, de la liberté de la presse et de la liberté d'expression. Nous ne devrions pas nous contenter de saluer des principes généraux énoncés dans un règlement européen ; le Parlement devrait se prononcer en faveur d'un renforcement de la transparence de la propriété des médias, de dispositifs anticoncentration, et de la protection de l'indépendance de l'audiovisuel public, du métier de journaliste et du secret des sources. Il ne faudrait pas que cette proposition de résolution soit utilisée pour masquer les problèmes français, voire protéger les errements du Gouvernement en matière de respect de l'indépendance de la presse.
Prenons l'audiovisuel public. La proposition de règlement européen prévoit un financement adéquat et stable, par les États membres, des fournisseurs de médias de service public pour que ceux-ci puissent remplir leur mission. Elle rappelle l'exigence d'indépendance éditoriale. Or que fait-on, dans cette proposition de résolution ? On se hâte d'atténuer cette exigence en précisant, à l'alinéa 31, qu'elle « ne doit pas remettre en cause les prérogatives des États membres en matière de financement et de désignation des dirigeants des médias publics ».
C'est, pardonnez-moi l'expression, gros comme une maison. Nous voilà soudainement sommés de défendre notre souveraineté face à la législation européenne… pour permettre au Gouvernement de disposer à loisir de l'avenir de notre audiovisuel public !
Quel symbole, quelques mois après que le Gouvernement a supprimé brutalement et sans que cela soit nécessaire la redevance qui finance l'audiovisuel public