Depuis quelques années, nous observons au sein de l'Union européenne de profondes transformations de l'espace médiatique, notamment une transformation numérique avec l'émergence des plateformes en ligne.
Pour garantir que toutes les voix puissent se faire entendre, nous devons instaurer de nouvelles régulations. L'enjeu est également de répondre aux pressions de plus en plus inquiétantes et intolérables que subissent les médias en Europe. Nous observons l'insécurité grandissante des journalistes, les ingérences publiques avec des médias qui deviennent de véritables outils de propagande, mais aussi des ingérences privées qui font planer des menaces fortes pour la liberté des médias, leur indépendance, leur pluralisme.
Il faut pouvoir préserver et garantir l'intégrité de nos médias car ils sont essentiels au bon fonctionnement de nos démocraties. C'est dans ce sens qu'au mois de septembre 2021, dans son discours sur l'état de l'Union, la présidente de la Commission européenne avait annoncé cette proposition de règlement, qui vise à harmoniser la régulation des médias entre les États membres. Si elle s'intéresse à l'environnement dans lequel évoluent les médias, elle ne prévoit aucunement d'en réguler le contenu.
Cette proposition est saluée et accueillie favorablement par le Gouvernement et les groupes de la majorité. En effet, elle prévoit des mesures fortes comme la protection de l'indépendance éditoriale ; l'indépendance et le financement stable des médias de service public, qui font l'objet d'attaques et de remises en cause permanentes. La résolution prévoit également la transparence de la publicité d'État ; l'interdiction de l'utilisation de logiciels espions contre les médias, les journalistes et leurs familles ; la protection des contenus publiés par les médias traditionnels sur les plateformes numériques ; la personnalisation de l'offre de médias ; des tests de pluralisme des médias au regard de la détention du capital. Les États membres évalueront l'incidence des concentrations capitalistiques sur les marchés des médias.
Enfin, elle prévoit la création d'un conseil européen des services de médias afin de mieux coordonner les mesures nationales de régulation des médias.
Je salue le travail de Constance Le Grip, rapporteure de la commission des affaires européennes, et celui d'Emmanuel Pellerin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, commissions qui ont successivement adopté la proposition de résolution.
Si nous nous réjouissons de la volonté d'élaborer un cadre commun pour les services de médias, nous avons néanmoins identifié, comme nous l'avons indiqué lors des débats en commission des affaires culturelles, certains points qui méritent d'être améliorés.
Tout d'abord, nous invitons l'Union européenne à prêter une attention particulière à l'articulation du règlement avec la directive sur les services de médias audiovisuels et les législations relatives aux services et aux marchés numériques. Comme le souligne l'Arcom, ces articulations devront être conçues de manière à rendre le dispositif cohérent et efficace.
Ensuite, nous demandons que les compétences du Comité européen pour les services de médias audiovisuels soient limitées, afin de préserver les spécificités de la presse écrite en France.
Par ailleurs, nous souhaitons que la proposition de résolution aille plus loin en matière de régulation des grandes plateformes, notamment en ce qui concerne l'obligation de rendre publics les motifs de retrait d'un contenu de médias traditionnels.
Nous souhaitons également que les garde-fous visant à garantir le fonctionnement indépendant des fournisseurs de médias publics ne remettent pas en cause les prérogatives des États membres en matière de financement et de désignation des dirigeants des médias publics.
Enfin, nous demandons à l'Union européenne d'envisager une analyse plus approfondie de l'instrument juridique utilisé. En effet, une directive européenne serait plus à même de fixer des objectifs contraignants tout en laissant à chaque État le choix de la forme et des moyens pour y parvenir ; elle permettrait ainsi de préserver les spécificités nationales.
Au-delà de ces points, auxquels nous demeurerons attentifs, les députés du groupe Renaissance voteront la proposition de résolution, qui permettra de garantir la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias au sein de l'Union européenne. Les états généraux du droit à l'information, qui se tiendront prochainement, permettront de tracer de nouvelles pistes de réflexion.
Nous tenons à rappeler ici notre soutien aux journalistes et aux médias, qui nous permettent, par leur travail sérieux et libre, de nous informer. La proposition de règlement est un moyen de renforcer, à l'échelon européen, notre capacité d'agir contre les ingérences, parce que renforcer la liberté des journalistes, c'est garantir notre État de droit.