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Intervention de Stéphane Lenormand

Séance en hémicycle du jeudi 12 janvier 2023 à 21h30
Revivifier la représentation politique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Lenormand :

Je ne le crois pas, soyons réalistes. Bouleverser notre régime électoral à l'occasion d'une niche de groupe n'est ni raisonnable ni souhaitable. Ce n'est pas en quelques heures que l'on rénove ou que l'on revivifie une démocratie.

Toutefois, il ne faut pas nier les failles du scrutin uninominal majoritaire actuel. Comme tous les modes de scrutin, il est largement perfectible ; il est vrai qu'il conduit à une surreprésentation de certains mouvements politiques. Cependant, croire que passer brutalement à une logique proportionnelle réglerait la question de l'abstention n'est pas non plus sérieux. Faire feu sur le scrutin majoritaire serait sans doute contre-productif. Je prends acte de votre détermination, monsieur le rapporteur, mais je crois que l'organisation du mode de scrutin mérite mieux qu'une simple proposition de loi présentée dans une niche – quel que soit le groupe qui la présente.

Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, constitué de représentants d'une grande variété de territoires, a longuement discuté de ce sujet : nos sentiments sont partagés et les avis divergent. Cela prouve bien qu'un travail de réflexion et des échanges sont nécessaires. À titre personnel, je suis favorable au scrutin proportionnel. Indéniablement, le scrutin majoritaire a montré ses limites au fil des années ; il conduit à une distorsion entre le nombre de voix octroyées par les citoyens et les sièges effectivement obtenus par les différentes tendances politiques. Ce constat est de nature à entretenir le sentiment de défiance des citoyens.

Un rapide tour d'horizon de l'Europe montre que la France fait figure d'exception. L'Autriche, l'Allemagne, l'Espagne, le Danemark, la Belgique ou encore le Portugal ont adopté un mode de scrutin à la proportionnelle. Toutefois, les règles de seuil et la répartition des sièges diffèrent fortement ; il y a autant de modes de scrutin à la proportionnelle que de pays. Je veux insister sur ce point, parce qu'il existe des divergences parmi les défenseurs de ce mode de scrutin, même en France. La question se pose : quel mode de scrutin à la proportionnelle choisir pour notre État ?

La présente proposition de loi vise à instaurer une proportionnelle totale, avec une élection dans les départements. Après avoir écouté une bonne partie des forces politiques représentées dans l'hémicycle, je constate qu'il n'y a pas de consensus sur la voie à suivre. Certains parlent d'une proportionnelle totale par département ou par région, d'autres préfèrent une simple dose de proportionnelle ou encore une démocratie participative. C'est la raison qui me pousse à vous dire, monsieur le rapporteur, qu'un débat plus global est nécessaire ; cette réforme ne pourra se faire en quelques heures à la fin d'une journée de niche.

J'estime en outre que toute réforme devra assurer une juste conciliation entre représentativité et proximité. Ainsi, nous sommes députés de la nation, mais aussi issus d'un bassin électoral déterminé. C'est d'ailleurs la richesse de cette chambre que de représenter non seulement les diversités politiques, mais également les diversités territoriales. Un député noue un lien privilégié et précieux avec un territoire identifié, lien qu'il est de notre devoir d'entretenir. Réviser le mode de scrutin devra donc se faire dans le respect des liens et des territoires.

Les doutes qui subsistent parmi les membres du groupe LIOT sur la méthode à suivre montrent à quel point seule une réflexion de fond pourra apporter une réponse à la hauteur des enjeux et des difficultés que traversent nos institutions. C'est pourquoi le groupe LIOT appelle à une réforme globale, qui prendra sans doute la forme d'une loi constitutionnelle et d'une loi ordinaire englobant la question sous toutes ses dimensions. N'oublions pas que pour lutter contre l'abstention, il nous faudra aussi prévoir le renforcement des règles et des droits du Parlement, ainsi qu'un troisième acte de la décentralisation pour confier plus de pouvoirs aux collectivités locales. Pour toutes ces raisons, le groupe LIOT ne donnera pas de suite favorable à cette proposition de loi.

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