Sur proposition du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, nous évoquons cet après-midi les aides publiques aux entreprises. En cette période marquée par des difficultés majeures pour de nombreux artisans et commerçants, le sujet revêt une résonance toute particulière. Comment, en effet, ne pas penser à cet instant aux boulangers, aux bouchers-charcutiers et à de nombreux autres professionnels touchés de plein fouet par la hausse exponentielle du coût de l'énergie et, dans certains cas, confrontés à une impasse dans leur activité quotidienne ?
Comme de nombreux parlementaires, je suis quotidiennement interpellé par ces professionnels, qui lancent un véritable appel au secours. Je me dois de souligner, à cet égard, que les dispositifs créés par le Gouvernement sont bien souvent trop restrictifs et trop compliqués. Le Président de la République en convient lui-même. Toutefois, comment pourrions-nous laisser entendre que ces femmes et ces hommes, ces entrepreneurs qui se lèvent tôt chaque jour pour nous nourrir et pour faire vivre la France, qui fournissent des services indispensables, seraient les profiteurs d'un système – si tant est, d'ailleurs, qu'ils réalisent le moindre profit ?
En matière d'aides publiques aux entreprises, il me semble utile de rappeler deux principes. Le premier réside dans la définition même de l'aide : selon le dictionnaire Larousse, le terme désigne le fait de « donner une assistance momentanée » ou de porter un « secours financier » temporaire à des entreprises ou à des industries. Le second principe est dérivé du droit européen : on ne peut pas faire ce qu'on veut. L'article 107 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) interdit en principe les aides publiques aux entreprises, au motif qu'elles sont susceptibles de fausser la libre concurrence et donc le fonctionnement du marché intérieur.
Soyons donc clairs, chers collègues : je ne souhaite pas que le débat qui nous occupe cet après-midi soit l'occasion de tirer à boulets rouges sur les entreprises ni sur celles et ceux qui font vivre tant de nos compatriotes et qui continueront de le faire demain. Les entreprises font l'économie, les entrepreneurs font la croissance et leur activité permet de financer notre système social redistributif.
Les aides publiques ont un double objectif : soutenir celles et ceux qui en ont besoin à un moment donné, et investir pour l'avenir afin d'assurer la compétitivité des entreprises. Par ailleurs, l'essor de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), de la notation sociale ou environnementale, ou encore de la labellisation a accru ces dernières années la pression sur les entreprises pour les inciter à adopter un comportement vertueux. Cette évolution coïncide avec la volonté de faire en sorte que les acteurs privés agissent au service de l'intérêt général. C'est notamment grâce aux aides publiques que la France est le pays émettant le moins de CO
Un autre point mérite d'être évoqué à ce stade du débat, parce qu'il est trop souvent occulté. Il s'agit de l'importance des territoires. Les entreprises, particulièrement les entreprises de taille intermédiaire (ETI), les PME ou les TPE, fonctionnent en réseau sur des bassins d'activités et d'emploi. Même si la part du soutien apporté par les collectivités territoriales est minoritaire par rapport au total des aides publiques versées, leur participation joue un rôle important, voire crucial, dans la mise en œuvre des politiques de transition énergétique, de recyclage des déchets, de mise en place de l'économie circulaire ou, tout simplement, d'activités économiques en réseau. Les aides de l'État sont quant à elles fortement territorialisées.
Vous l'aurez compris, j'estime que ce débat doit porter sur la façon dont nous, parlementaires et membres du Gouvernement, pouvons aider les acteurs économiques de nos territoires à faire face aux enjeux d'aujourd'hui et de demain, et à aller de l'avant pour renouer avec la liberté d'entreprendre. Je ne souhaite pas que nos échanges se limitent à la dénonciation d'un prétendu gavage des actionnaires du CAC40 – accusation qui constitue le fonds de commerce de certains, qui semblent hélas préférer la démagogie à l'analyse réaliste du tissu économique. Soyons clairs : sans un interventionnisme raisonné de la part de l'État et des collectivités territoriales par le biais d'aides publiques parfois soumises à conditions, de nombreux secteurs, déjà en difficulté, auraient désormais totalement disparu.
La question n'est pas récente, comme en témoignent les nombreux rapports remis par le Parlement, la Cour des comptes et les inspections générales sur les aides aux entreprises et leur conditionnalité. J'ai moi-même présidé, il y a quelques mois, une mission d'information dont le rapport final contient vingt-trois propositions, visant notamment à subordonner le versement des aides publiques aux entreprises au respect d'un certain nombre de finalités. Il est clair que tout versement d'une aide publique doit être précédé de la vérification du respect, par l'entreprise bénéficiaire, de ses obligations sociales, fiscales et environnementales. Nous devons garantir à nos concitoyens que le versement des aides publiques est assorti de conditions et soumis au respect de certains principes et exigences, comme l'égalité entre les femmes et les hommes ou le partage de la valeur.