J'insiste sur le fait qu'on ne peut pas demander à un industriel, qui doit démontrer pouvoir équilibrer son bilan en fin d'année, de supporter un projet sur cinquante ans. Cela ne peut pas être sa décision. J'aimerais vous avoir convaincu que l'État doit être le maître de sa politique. Nous pouvons être souverains : cela ne veut pas dire avoir une indépendance totale, c'est être libres de nos choix. Nous ne sommes pas obligés de ne faire que du nucléaire mais celui-ci doit faire partie des différentes options. En mettant un terme à Astrid, on a empêché le futur Président de la République, qui sera peut-être complètement coincé dans quinze ou vingt ans, d'opter pour cette énergie. Mon devoir est d'offrir un maximum de choix au Président ; c'est ensuite sa responsabilité, en tant qu'autorité politique, de trancher.
Il me semble important que l'État ait conscience de son rôle. Savoir être autonome est une nécessité, car cela permet de mieux coopérer avec les autres. Dans ma vie, j'ai énormément coopéré avec les États-Unis et j'ai constaté que les Américains donnent d'autant plus volontiers que vous leur en donnez autant. Ne nous faisons pas d'illusions, dans ce monde, si nous n'avons pas de connaissances ou de technologies à donner aux autres en face, nous ne pourrons pas échanger avec eux. Même si on ne construit pas de réacteur industriel de quatrième génération, l'avoir dans la manche permet d'offrir un choix à notre président et la possibilité de l'échanger contre quelque chose d'autre. Voilà ma conviction.